JARDINS EN ART : une galerie parisienne originale

Le Masque, Jardin du Luxembourg, 08h50, 27 février 2005©Claire de Virieu

Le Masque, Jardin du Luxembourg, 08h50, 27 février 2005©Claire de Virieu

Le jardin du Luxembourg sous la neige … C’est paradoxalement l’exposition de printemps de la Galerie Jardins en Art qui offre au visiteur cette vision dépaysante et poétique du jardin parisien. Ouverte il y a un an, le 22 mai 2014, cette galerie atypique et raffinée est née de la double passion horticole et artistique de son fondateur, Jérôme Marcadé. Rue Racine, dans un lieu chargé d’histoire, Jardins en Art propose une programmation artistique et culturelle rythmée par les saisons, avec des expositions rassemblant des œuvres de photographes, peintres, plasticiens, artisans d’art ainsi que des rencontres, dédicaces, conférences sur le thème des jardins et de la nature. Sans oublier un espace librairie, dédié aux beaux livres.
Exposition à voir jusqu’au 23 mai.

22 rue Monsieur-le-Prince//deux plaques rappellent que de Gandalara et Yves Brayer ont habité l'immeuble

22 rue Monsieur-le-Prince//deux plaques rappellent que de La Gandara et Brayer ont habité l’immeuble/ Photo db

Un lieu chargé d’histoire… Les deux niveaux de la galerie s’inscrivent dans un ensemble architectural  dont l’entrée se trouve au 22 de la rue Monsieur-le- Prince. Car nous sommes ici sur les terrains de l’ancien Hôtel du Prince de Condé, un vaste ensemble de bâtiments, de cours et de jardins – le théâtre de l’Odéon a été édifié à la fin du XVIIIe siècle sur une partie des jardins.

Et si le bâtiment actuel a été construit entre 1820 pour la partie basse et 1840 pour la partie haute, les pavés de la cour, comme la margelle du puits, témoignent eux de cette époque plus lointaine.

Dans la cour du 22 rue Monsieur-le-Prince, à droite entrée de l'immeuble/ Photo db

Dans la cour du 22 rue Monsieur-le-Prince, ,au 1er plan une sculpture de Jean Marc de Pas; à droite entrée de l’immeuble/ Photo db

Mais laissons Jérôme Marcadé nous conter l’histoire de ces lieux qui sont ceux de ses ancêtres, dont on peut voir les portraits dans l’entrée de l’immeuble, aujourd’hui habité par des locataires. « Mes ancêtres étaient dans l’édition et en particulier géraient les droits d’auteur de Victor Hugo. Leur gendre a lui-même créé une maison d’édition dans le domaine scientifique. Ces maisons n’existent plus depuis longtemps ».

L’immeuble a la particularité d’avoir abrité les premiers ateliers créés et conçus pour des artistes, « ce qui était en soi une nouveauté à l’époque. Parmi les premiers résidents il y avait Antônio de La Gandara, un peintre mondain de l’époque de Proust, qui a eu un certain succès, surtout pour ses portraits de la haute société qui a défilé dans l’immeuble. Il a pendant quelque temps loué son atelier à son ami Whistler qui a peint notamment le portrait de Montesquiou que l’on trouve actuellement à la Frick Collection de New York. Il y a d’ailleurs un petit livre publié par Flammarion il y a quelques années, écrit par le conservateur de l’époque qui raconte l’histoire de ce portrait et où l’immeuble est abondamment cité… (3)

L'espace Beaux livres de la galerie Jardins en Art/ Photo db

L’espace Beaux livres de la galerie Jardins en Art/ Photo db

Parmi les hôtes célèbres des lieux on citera aussi Gustave Doré, Arthur Rimbaud et, « plus près de nous, Yves Brayer, qui a vécu ici plus de 50 ans et y est mort en 1990. Sa veuve habite toujours l’immeuble, et son fils celui d’en face. Robert Doisneau y a aussi travaillé, son maitre étant André Vigneau, un des premiers photographes à avoir créé un studio de photo dans Paris. Il se trouvait au fond de la cour, au rez-de-chaussée ».

Les artistes ont toujours leur place au 22 de la rue Monsieur-le-Prince, avec « quatre grands ateliers de peintre, dont un a été conçu par un élève de Le Corbusier, et des ateliers de graveurs tout en haut sous les verrières ».

Le mouleur d’art italien, Michel Lorenzi (arrière grand-père de Michel Lorenzi, également mouleur d’art), s’était lui aussi installé au 22 et avait son échoppe à la place du fleuriste, dont la boutique jouxte celle de la Galerie. Jérôme Marcadé avait d’ailleurs d’abord envisagé d’ouvrir une galerie de sculptures, après le départ de Lorenzi et avant que celui des éditions Le Dilettante, du 19 de la rue Racine, ne lui permette de concrétiser ce projet de galerie dédiée aux jardins et à l’art.

Galerie Jardins en Art / Photo db

Galerie Jardins en Art / Photo db

Une galerie où il est temps de retourner après ce détour par l’histoire des lieux pour y découvrir, entre autres, l’exposition dédiée au jardin du Luxembourg. Sur les photographies grand format en noir et blanc de Claire de Virieu, couvert d’un manteau de neige, le jardin apparait tel qu’on ne le voit jamais mais auquel la photographe a eu le privilège d’accéder en cet hiver 2005. Résultat : des clichés magnifiques, où la poésie se nourrit de l’esthétique épurée du lieu désert. La dizaine de photographies exposées sont issues d’un ouvrage sur les jardins de Paris qu’on peut feuilleter dans la galerie. (2)

L'Allée©Pascale P. Maes

L’Allée©Pascale P. Maes

C’est une tout autre vision de l’hiver au jardin que propose Pascale P.Maes. L’artiste, peintre figuratif qui travaille l’huile ou le pastel, a eu accès à l’Orangerie. A travers une vingtaine d’oeuvres sur toile ou sur bois, elle raconte son « séjour au coeur de l’hiver tropical dans la jungle de l’Orangerie du Sénat enfouie sous les palmiers, parmi les caisses d’orangers ».

M. Boucher Les trois Fauteuils©Michel Boucher

M. Boucher Les trois Fauteuils©Michel Boucher

Quant à Michel Boucher, illustrateur et peintre, Il s’est emparé de manière à la fois réaliste et naïve de ce motif indissociable du décor du jardin du Luxembourg que sont ses chaises et fauteuils de métal peints en vert. Des sièges dont l’immuabilité incite à la nostalgie. Quel Parisien n’a pas de souvenir qui leur soit attaché ? Certains se souviendront du temps où, payants, ils obligeaient leurs locataires à des déplacements fréquents pour échapper aux préposés aux tickets…

Ces œuvres de l’exposition temporaire de printemps, cohabitent avec d’autres à la présence plus pérenne. Comme les sculptures de Jean Marc de Pas, réunies pour l’exposition inaugurale de la galerie en mai 2014, et qui vont bientôt céder la place aux sculptures et peintures de Françoise Bissara-Fréreau. (2) Ou les natures mortes en trompe l’œil de Paul Magendie.

Au titre des artistes représentés en permanence par la galerie Jardins en Art, il faut aussi mentionner les photographes Jean-Baptiste Leroux (4), Anne-Marie Arbefeuille et Rachel Levy, la sculptrice Anne-K Imbert, la designer Cécile Planchais et le ferronnier d’art Jérôme Quilan.

L’univers de la décoration et de l’art de vivre a tout naturellement trouvé sa place dans la galerie Jardins en Art, avec des créations exclusives, comme le service de table des fleurs des quatre saisons créé par Marie Daage, en porcelaine de Limoges peinte à la main ou la collection de bougies « Quintessence » aux senteurs inédites du potager.

En un an, de rencontres en projets, Jardins en Art a multiplié les propositions, toujours « dans l’esprit d’une galerie dédiée aux artistes qui travaillent de près ou de loin sur la thématique du jardin et de la nature au sens large », tient à souligner Jérôme Marcadé. Et d’autres projets sont en germe pour la deuxième année de la galerie …

JARDINS EN ART

(1) Edgar Munh All, Whistler et Montesquiou, Le papillon et la chauve-souris, traduit de l’anglais par Dennis Collins. The Frick Collection/Flammarion, Paris, 1995. Notons que l’immeuble historique de Flammarion se trouve également rue Racine, juste en face de la Galerie..
(2) Claire de Virieu, Paris Jardins, Editions Imprimerie Nationale
(3) L’exposition Jardins au bord du mystère, présentée à la Galerie Jardins en Art du 28 mai au 26 septembre 2015 dans le cadre de « Art Saint-Germain-des-Prés », réunira une trentaine d’œuvres de Françoise Bissara-Fréreau, expressions de « nos jardins secrets, nos enclos d’âmes qui transcendent le temps ».
(4) Jean-Baptiste Leroux, photographe passionné par l’art des jardins, a publié plusieurs ouvrages sur le sujet, dont Jardins à la française pour lequel il a reçu en 2000 le prix Redouté du meilleur livre sur l’art des jardins et le prix Eugène Carrière de l’Académie française. Il a également publié Jardins en Touraine (2007) et Les Jardins de Versailles (Actes Sud, 2009).

Jérôme Marcadé par Jean-Baptiste LEROUX_avril 2015

Jérôme Marcadé par Jean-Baptiste LEROUX_avril 2015

Galerie Jardins en Art
19 rue Racine
75006 Paris

Tél: + 33 (0)1 56 81 01 23
contact@jardinsenart.fr

Ouvert du mardi au samedi de 10h à 20h et le lundi de 14h à 20h

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3 commentaires pour JARDINS EN ART : une galerie parisienne originale

  1. toujours un plaisir de suivre les articles du blog

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  2. Merci beaucoup pour cette belle découverte ! La photo en « une » du Jardin du Luxembourg sous la neige est magnifique et j’aime beaucoup l’oeuvre « les 3 chaises » !

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  3. Ping : Biennale de Sologne : « Quand les Doutes deviennent Forme »… | De Belles choses

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