Salon Rétromobile 2025 : parcours sélectif et regards décalés…

RÉTROMOBILE 2025 / DS BALLONS reconstituée/ Photo Ph.M
La 49ème édition de cette manifestation dédiée aux voitures anciennes s’est tenue du 5 au 9 février au Parc des Expositions de la Porte de Versailles à Paris. Un Salon destiné aux connaisseurs et acheteurs – les ventes officielles ont totalisé près de 25 millions d’euros -, mais aussi au grand public – curieux ou passionnés – pour lequel c’est une occasion unique de voir des modèles devenus rares, voire mythiques pour certains. C’est un peu le cas de la DS dont l’édition 2025 de Rétromobile commémorait les 70 ans, en lui consacrant son affiche et un espace dédié.
Une affiche qui mérite quelques explications… Elle reproduit la DS Ballons de 1959, celle qui figurait sur l’image créée par le publicitaire Claude Puech pour mettre en avant le confort des différents véhicules de la gamme : une DS bicolore (marron clair/crème) semblant flotter sur l’eau grâce à 4 sphères orange en guise de roues.

DS Ballons de 1959 flottant sur l’eau – ©Pierre Jahan:Archives Terre Blanche
Si l’ original n’existe plus, un modèle reconstitué (1) figure au centre de l’espace que Rétromobile dédie à la DS, posé sur ses ballons au milieu d’une surface réfléchissante, sous un imposant lustre, sorti des ateliers Mathieu Lustrerie, où ont été restaurés les lustres de la nef de Notre-Dame de Paris.

DS 19 au SALON de 1955 / DR
Une vraie « mise en lumière » de la DS 19, présentée pour la première fois au grand public lors du Salon de l’Automobile de Paris, en octobre 1955 au Grand-Palais. 12 000 commandes seront enregistrées pendant la durée du Salon. Il faut dire que vingt ans après la Traction, Citroën opère avec la DS une véritable révolution, tant dans la silhouette résolument nouvelle du véhicule, signée du designer automobile italien Flaminio Bertoni, que dans les innovations technologiques.
Elle sera déclinée en plusieurs versions dont quelques-unes sont exposées sur l’espace anniversaire de Rétromobile. La production de la DS a cessé définitivement en 1975. Au total 1 455 746 exemplaires auront été fabriqués.

Rétromobile 2025/ La Traction du Général de Gaulle / Photo Ph.M
De Gaulle en fera la voiture présidentielle. Si c’est avec sa Traction personnelle que le Général est arrivé à l’hôtel Matignon pour sa prise de fonction comme président du Conseil en juin 1958, c’est en DS qu’à partir des années 1960 il effectuera ses déplacements, officiels et privés. C’est à bord d’une DS 19 qu’il réchappe de l’attentat du Petit Clamart le 22 août 1962.
C’est par hasard d’ailleurs qu’on la découvre, cette Traction personnelle du Général, exposée sur le stand du club « La Traction Universelle ». Une Traction 15 H que de Gaulle a achetée en 1955 pour son usage personnel et qu’il a utilisée régulièrement – avec souvent son chauffeur au volant, d’où l’aménagement de la banquette arrière – pour se rendre de Colombey-Les-Deux-Églises à Paris entre 1955 et 1958. Conservée par les descendants de la famille de Gaulle, la voiture est régulièrement présentée au Mémorial Charles De Gaulle à Colombey-les-deux Églises.

Rétromobile 2025, Citroën Kégresse P4 T (Croisière « Noire » 1924) / Phodo db
Autre évocation historique en parcourant la passerelle entièrement dédiée aux autochenilles Kegresse, du nom de leur concepteur Adolphe Kegresse. Un homme au parcours singulier, de sa Franche-Comté natale à sa collaboration avec André Citroën, en passant par son rôle de conseiller du Tsar Nicolas II et son exil suite à la Révolution d’Octobre. Une dizaine de véhicules Citroën – décidément on ne quitte pas la marque au chevron – sont présentés, dans une scénographie évocatrice qui renvoie aux fameuses « croisières Citroën » de l’époque coloniale en Afrique (1924/1925) et en Asie (1931/1932), dites « noire » et « jaune » … Il y a eu aussi la « blanche », effectuée en 1934 sur le continent nord américain à l’assaut des montagnes Rocheuses canadiennes … Un fiasco. (2)

Rétromobile 2025, la Merceds-Benz de la Callas / Photo Ph.M
Retour dans le grand hall du rez-de-chaussée pour une dernière déambulation. Avec un premier arrêt au stand Mercedes-Benz, où est exposée la limousine bicolore – carrosserie gris argenté métallisé et toit bleu métallisé – ayant appartenu à La Callas. « Une mercedes 600, d’une longueur totale de 5,54 m, avec boiseries et velours à l’intérieur, équipée notamment d’un système audio Becker Grand Prix spécialement conçu pour être commandé depuis la banquette arrière. Un véhicule qui a conduit la Callas à San Remo, Milan et Paris, entre autres… », nous dit le cartel. De quoi faire rêver l’acheteur potentiel. Elle est à vendre…

Rétromobile 2025, Bugatti « cousue », détail/Photo db
Une voiture « cousue » ! l’exclamation aura échappé à l’auteure de ces lignes et fille de couturière, devant le flanc d’une Bugatti parcouru d’une couture en zigzag, ou du moins d’un dispositif y ressemblant fort.Devant son étonnement, un visiteur, visiblement éclairé, lui expliquera qu’il s’agit en fait d’une technique particulière employée sur cette voiture de course des années 1930, et destinée à sécuriser le serrage des boulons fixant la carrosserie au chassis et qui consiste à faire passer un fil d’acier d’un boulon troué à l’autre, avec un parcours en zigzag …

Rétromobile 2025/Bugatti années 1930 / Photo db
Disert, l’interlocuteur improvisé donnera aussi quelques précisions sur Bugatti, « un nom italien pour une marque née en Alsace en 1909 »… Ettore Bugati, un créateur automobile dont l’entreprise était basée à Molsheim, en Alsace. Les premières Bugatti étaient des voitures de course légères dont les performances ont créé le succès. « La marque existe toujours, mais avec moins de légèreté », déplore notre visiteur éclairé… (3)

Rétromobile 2025, Alpine gendarmerie restaurée/ Photo Ph.M
Lequel attire aussi notre attention sur le stand de la gendarmerie nationale où est exposée une Alpine, « pas n’importe laquelle », puisqu’il s’agit de l’Alpine A 110 1600S (immatriculée 611 0995) qui faisait partie d’une flotte de 14 voitures de ce type affectées à la gendarmerie sur l’autoroute A1 reliant Paris et Lille, de 1971 à 1979. Réformée, la voiture a été achetée par un particulier qui l’a repeinte, donc banalisée, et a roulé avec avant de la remiser en 1990 dans un garage où elle est restée pendant 30 ans…

Alpine gendarmerie, « l’épave » dans son garage/ Photo L’Argus
Jusqu’à ce que « l’épave » soit mise en vente, en 2022. Authentifiée alors par Jean-Yves Hardouin, responsable de la mémoire mécanique du Musée de la gendarmerie nationale, elle sera rachetée par le fonds de dotation du musée. Et après un an de restauration, elle est présentée à cette 49ème édition de Rétromobile, avant de rejoindre les quelque 200 véhicules anciens de la collection du Musée de la gendarmerie nationale à Melun. Une histoire insolite …
Ce sera la dernière. Tandis que l’auteure de ces lignes s’apprête à quitter les lieux ce dimanche 9 février, dernier jour du Salon, le visiteur passionné – il confiera n’avoir manqué aucune édition – va rester jusqu’à l’heure de fermeture, pour voir rouler les premières voitures quittant les stands pour rejoindre leur port d’attache – ou peut-être celui de leur nouveau propriétaire. « Un moment particulièrement émouvant »… On l’imagine volontiers.
La prochaine édition – celle du cinquantenaire – aura lieu du 28 janvier au 1er février 2026. Et pour la première fois, Rétromobile s’installera, en plus de son édition parisienne, à New-York. Avis aux amateurs.
En attendant, on peut rêver devant des miniatures… Des Dinky Toys, de préférence.

Rétromobile 2025/ vitrine de miniatures Dnky Toys / Photo db
(1) Une reconstitution réalisée par les élèves du GARAC (École nationale des professions de l’automobile), elle a demandé près de six mois de travail.
(2) L’instigateur de cette dernière « croisière », un certain Charles Bedaux, homme d’affaires français ayant fait fortune en Amérique, a entretenu des relations très étroites avec le régime nazi au cours des années 30 et 40. Arrêté par les autorités américaines en janvier 1944, il a été rapatrié aux États-Unis et emprisonné à Miami où il est mort un mois plus tard après avoir absobé des barbituriques. On ne s’étonnera pas que Charles Bedaux alors propriétaire du château de Candé y ait accueilli le 3 juin 1937 le mariage du duc de Windsor – ex-roi Édouard VIII – et de Wallis Simpson. Lesquels seront invités par Hitler dans sa résidence de Berchtesgaden …
(3) le dernier modèle, baptisé Tourbillon, est en effet un « hypercar » (voiture sportive très puissante) hybride qui vaut près de 4 millions d’Euros. Les 250 modèles fabriqués auraient tous déjà été vendus…
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