Horizons lusophones

« Les Contes cruels de Paula Rego » au musée de l’Orangerie

Paula Rego, « la fille du policier »  1987 © Paula Rego. Courtesy Marlborough Fine Art

À 80 ans passés, l’artiste portugaise Paula Rego fait enfin l’objet d’une exposition conséquente dans un musée parisien.(1) Rassemblant quelque soixante oeuvres –  peintures et gravures des années 1980 à 2000 – ces « Contes cruels », s’ils constituent davantage une anthologie qu’une rétrospective, permettent néanmoins une approche cohérente de l’art singulier, puissant et dérangeant de Paula Rego. Un art figuratif et narratif qui puise son intensité et souvent sa violence dans la propre vie de l’artiste, la complexité des rapports humains, la condition des femmes, la cruauté des contes, l’incohérence des rêves, le brouillage des frontières entre l’humain et l’animal. L’intérêt de cette exposition du musée de l’Orangerie réside aussi dans le fait de présenter des oeuvres de Goya, Redon, Daumier ou Louise Bourgeois, en contrepoint de celles de Paula Rego. À voir jusqu’au 14 janvier 2019.

Paula Rego est née à Lisbonne en 1935, sous la dictature de Salazar, « une société implacable, mortelle pour les femmes » (2). Paradoxalement, c’est grâce à son père, profondément libéral et conscient du talent de sa fille pour le dessin et la peinture, qu’en 1952 elle quitte le Portugal pour l’Angleterre où elle va étudier à la Slade school of Fine Art de Londres. C’est là qu’elle rencontre le peintre Victor Willing qui deviendra, des années (et trois enfants) plus tard, son mari. De 1957 à 1974, le couple vit au Portugal, où Paula Rego commence à se faire connaître à travers des collages très politiquement incorrects, notamment contre les guerres coloniales. Durant cette période, elle partage son temps entre le Portugal et Londres où elle expose en 1962 et 1965 et où elle s’installera définitivement en 1974. En 1976, grâce à une bourse de la Fondation Gulbenkian, elle se plonge dans l’univers des contes et de leurs illustrations, au fil des mois passés au British Muséum et à la British Library, « certains rencontrent Dieu, d’autres les contes », dira-t-elle. Une manière « d’aller aux origines, à ce qui est en nous et ne connaissons pas ». Son style redevient alors plus figuratif. En 1987, elle expose avec succès sa série Girl and Dog.

Paula Rego, « La Danse » 1988 © Tate London 2018

Le tableau La danse choisi pour l’affiche et exposé dans la première salle est daté de 1988. C’est l’année où son mari meurt d’une sclérose en plaques détectée vingt ans plus tôt et qui l’a progressivement cloué sur un fauteuil roulant. Cette scène de danse au clair de lune, à la fois réaliste et onirique, peut être lue comme une évocation des années, plutôt heureuses, où le couple et ses trois enfants ont vécu au Portugal, à Ericeira, sur la côte. Willing, au premier plan, danse avec une partenaire dont la blondeur évoque une autre femme que son épouse – rappel sans doute d’un épisode douloureux. Paula Rego, ce serait plutôt cette figure féminine imposante en costume traditionnel qui, tournant le dos à la mer et ignorant les danseurs, s’avance seule mais résolue, vers ce qui est à venir…

La Tate Gallery achète ce tableau en 1989. La même année, l’artiste fait l’objet d’une première exposition personnelle, « Paula Rego : Nursery Rhymes », à la prestigieuse Galerie Marlboro Fine Art de Londres, qui la représente désormais. Réalisant ses propres illustrations gravées de ces comptines pour enfants, elle fait ressortir la cruauté et la perversion souvent sous-jacentes dans les contes pour enfants.

Paula Rego, « Femme-chien » © Musée de l’Orangerie/Sophie Boegly Crépy

À partir des années 1990, Paula Rego travaille au pastel. C’est avec cette technique qu’elle réalise des oeuvres de grand format.  Habitée par une certaine littérature et culture visuelle du XIXe siècle, réaliste et fantastique  – Jane Eyre, Peter Pan, Daumier, Goya, Lewis Carroll, Hogarth, Ensor, Degas… , elle y mêle des éléments autobiographiques et des thèmes de société. On l’aura compris, les histoires sont au coeur de sa création artistique. Des « histoires » avec lesquelles elle prend des libertés: « tout en aimant les histoires je veux les malmener comme lorsqu’on cherche à faire du mal à la personne que l’on aime ». Une ambivalence qui traverse son oeuvre. Comme ces Mulheres Cão (femmes-chien)  : « Dans ces tableaux chaque femme-chien n’est pas opprimée, mais puissante ».

Paula Rego, Dancing Ostriches © Musée de l’Orangerie/Sophie Boegly Crépy

 

 

 

 

 

 

 

 

Le cinéma sera aussi source d’inspiration, lorqu’en 1995, sollicitée dans le cadre de l’exposition célébrant le centenaire du cinéma, Paula Rego s’inspire  de la Danse des autruches du film Fantasia de Walt Disney pour créer la série Dancing Ostriches. Dans ces tableaux au pastel, les femmes sont massives, comme souvent, et maladroites, à l’instar des volatiles. En contrepoint, les danseuses de Degas, elles aussi sans véritable grâce et au pastel, sont bienvenues…

Paula Rego, élément de gauche du tryptique « The Fisherman » (« Le Pêcheur ») © Musée de l’Orangerie/Sophie Boegly Crépy

Dans les dernières oeuvres présentées (années 2004-2005), c’est un personnage de théâtre qui apparait, le « Pillowman », inspiré de la pièce du même nom de Martin McDonagh (4) qu’elle découvre en 2003. Cet « homme oreiller » est au coeur de deux grands triptyques, celui du pêcheur et  le Pillowman… Dans ce personnage, dont l’apparence peut paraître effrayante, Paula Rego projette l’image de son père, protecteur et aimant. C’est à ses côtés qu’elle a découvert livres et images …

Par ailleurs, dans son atelier de Londres, Paula Rego façonne et met en scène mannequins, poupées et masques, crée des personnages ou animaux qu’elle transforme et travestit, les installant dans des sortes de saynètes. Elle s’entoure de sculpteurs comme Cathie Pilkington ou Ron Mueck, son gendre, dont on peut voir le Pinocchio dans l’exposition.

Paula Rego, « O Anjo », 1998 © Musée de l’Orangerie/Sophie Boegly Crépy

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quant au tableau O Anjo, impressionnante figure féminine d’ange à la fois gardien et vengeur, glaive dans la main droite et éponge dans l’autre, symboles de la Passion du Christ, on peut y voir – au-delà de l’histoire (O crime do Padre Amaro) qu’il conclut (4) – comme une représentation à la fois réaliste et symbolique de la femme : forte, déterminée et agissante, telle que la sait et la souhaite Paula Rego…   

Unique artiste femme du groupe de l’École de Londres qui regroupe entre autres Francis Bacon, Lucian Freud ou David Hockney, elle y a toute sa place avec une oeuvre qui, largement reconnue en Angleterre et au Portugal (où elle a son musée), ne l’est pas encore suffisamment en France.

Espérons que cette exposition au musée de l’Orangerie contribue à la faire mieux connaître, en attendant la rétrospective qui donnera enfin toute la mesure de l’oeuvre de Paula Rego … ( 5)

Paula Rego, Pinocchio ©-Musée de l’Orangerie/Sophie Boegly Crépy


(1) Une première exposition de Paula Rego avait été présentée en 2012 à la Fondation Calouste Gulbenkian à Paris, en partenariat avec la Fondation Paula Rego/Casa das Histórias à Cascais au Portugal.
(2) Paula Rego, in Histórias & Segredos, un film de Nick Willing, le fils de l’artiste. Dans ce documentaire passionnant réalisé en 2016 par son fils, Paula Rego a accepté de se confier sur sa vie et son oeuvre. (Édité en dvd)
(3) Dramaturge et réalisateur britannique que son film Three Billboards (Les panneaux de la vengeance) en 2017 a fait connaître.
(4) Il s’agit d’une série de tableaux (1998) basée sur le roman O crime do Padre Amaro, de l’écrivain portugais du XIXe siècleÉça  de Queiroz. Le livre, publié en 1875, a été censuré à l’époque pour son anti-cléricalisme.
(5) On pense à la rétrospective Amadeo de Souza Cardoso (1887-1918), organisée au Grand-Palais en 2016 et qui nous avait permis de découvrir l’originalité de ce peintre portugais.

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                                    LA FRANCE AU BRÉSIL sur GALLICA

Femmes-cabocles-blanchisseuses-a-rio-de-janerio-par-jean-baptiste-debret-1834-1839 © Bnf

Femmes cabocles blanchisseusesà Rio de Janeiro par Jean-baptiste Debret 1834-1839 © Bnf

 

De nouvelles pages « Collections » consacrées à la France au Brésil sont disponibles dans Gallica. Elles présentent certains épisodes majeurs d’une histoire partagée qui, depuis l’arrivée de Villegagnon dans la baie de Rio de Janeiro en 1555, s’est nourrie de récits évocateurs.

En 2009, dans le cadre de « L’Année de la France au Brésil », la Bibliothèque nationale de France et la Bibliothèque nationale du Brésil ont conçu en partenariat un portail numérique intitulé « La France au Brésil« . Destiné à valoriser un ensemble de documents représentatifs de l’histoire des relations entre les deux pays du XVIesiècle à nos jours, ce site renouait les fils d’une histoire singulière, riche de contacts et d’échanges. C’est dans la continuité de ce projet que Gallica ouvre aujourd’hui de nouvelles pages thématiques : imprimés, manuscrits, cartes, dessins et photographies sélectionnés dans les collections numériques attestent la présence réelle de la France au Brésil, mais aussi son étonnante fortune symbolique.

Si, à l’avenir, le corpus « La France au Brésil » est encore destiné à s’étoffer, en particulier de documents audiovisuels, il a d’ores et déjà pu être considérablement enrichi grâce à une convention entre la BnF et la Bibliothèque Sainte-Geneviève, qui a permis de numériser et de verser dans Gallica plus de 340 documents issus du fonds Ferdinand Denis, classé au Patrimoine culturel de l’humanité par l’Unesco en 2012. Ferdinand Denis (1838-1885), qui fit toute sa carrière à la Bibliothèque Sainte-Geneviève, consacra en effet au Brésil une dizaine d’ouvrages et devint une figure tutélaire des études brésiliennes en France.

(Mis à jour le 10/11/2016)

Atlas natique du monde dit Atlas MILLER © Bnf

Atlas natique du monde dit Atlas MILLER © Bnf

 

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          Le Festival du cinéma Brésilien de Paris : 18 printemps déjà …

FEST CINE BRÉSIL


Le Festival du Cinéma brésilien de Paris souffle ses 18 bougies du 5 au 12 avril 2016 avec une vingtaine de films – fictions et documentaires. Présentés en avant-première française, européenne ou mondiale, ils sont projetés dans la grande salle du cinéma L’Arlequin, au coeur de Saint-Germain-des-Prés, qui accueille depuis maintenant une dizaine d’années le Festival. Une occasion d’aller à la rencontre d’une production cinématographique trop rarement diffusée dans l’hexagone, à quelques exceptions près…

… comme par exemple, l’excellent Les bruits de Recife (O son ao redor), de Kleber Mendonça Filho, un film de 2012 sorti en France en 2014 et qu’on avait pu voir en avant première au Festival de Cinéma brésilien… Ou le très beau Historias,  premier long métrage de fiction de Julia Murat sorti en 2012, après avoir été plébiscité par le public lors du Festival.

"Nise da Silveira" / DR

« Nise, le coeur de la folie » / DR

Reste à découvrir quelle(s) pépite(s) réserve cette 18e édition avec ses vingt films sélectionnés : quinze fictions dont huit en compétition pour le Prix du Public, et cinq documentaires. La  directrice du Festival, Katia Adler, annonce des « films forts » abordant des thèmes comme « l’avenir de la jeunesse, les violences domestiques, l’importance fondamentale  ou les questions sociales« .

À commencer par le film d’ouverture, Nise, le cœur de la folie (Nise, o coração da locoura) qui retrace la vie de cette grande révolutionnaire de la psychiatrie qu’a été Nise da Silveira  (1905 – 1999 ), et qu’incarne Glória Pires, qui a fait le déplacement à Paris, avec le réalisateur  Roberto Berliner. (1)

Un hommage sera rendu à Eduardo Coutinho, maître du documentaire et une figure de la scène culturelle brésilienne, Grand prix du festival Cinéma du Réel en 1985, avec la projection de son dernier film, Dernières conversations. 

"A Lisbonne, j'ai pensé à toi" / DR

« A Lisbonne, j’ai pensé à toi » / DR

Parmi les rencontres, signalons celle avec le romancier Luiz Ruffato, qui aura lieu à l’issue de la projection (dimanche 10 avril à 19h) de l’adaptation au cinéma de son livre À Lisbonne j’ai pensé à toi, par le réalisateur José Barbona. L’écrivain Milton Hatoum sera également présent, à l’occasion de la projection de Les orphelins de l’Eldorado (Orfãos do eldorado) de Guilhermo Coelho.

"Le professeur de violon" / DR

« Le professeur de violon » / DR

Et le festival se refermera doublement en musique. D’abord avec le film de Sérgio Machado, Le professeur de violon (Tudo que aprendemos juntos), en présence de l’acteur et chanteur Criolo, puis avec la chanteuse Teresa Cristina qui emmènera le public sur les traces de l’histoire de la samba en revisitant le vaste répertoire du légendaire compositeur Cartola (1908-1980), l’un des plus grands noms de la musique brésilienne.

Au total, une quinzaine de réalisateurs et réalisatrices auront fait le déplacement pour présenter leurs films à cette 18e édition du Festival du Cinéma brésilien de Paris, et autant de producteurs/productrices et acteurs/actrices, faisant de cette manifestation un rendez-vous exceptionnel avec la création cinématographique brésilienne.  (2)

Pour en savoir plus sur les films et les horaires, cliquer ici

Eduardo Coutinho-DR/terra.com.br

Eduardo Coutinho-DR/terra.com.br

 

(1) Pour ceux qui auront raté le film en ouverture du festival, une séance de rattrapage a lieu le vendredi 8 avril à 16h30

(2) Au cours de ses 17 éditions précédentes, le festival a projeté plus de 450 films en 800 sessions, pour un public de plus de 70 000 spectateurs. De grands noms du cinéma brésilien, tels que Nelson Pereira dos Santos, Carlos Diegues et Fernanda Montenegro y ont déjà participé, ainsi que quelques 450 invités du monde du grand écran.

Cinéma l’ARLEQUIN
76 Rue de Rennes
75006 Paris
 01 45 44 28 80

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                             LE PRINTEMPS CULTUREL PORTUGAIS

Le printemps culturel portugais met à l’honneur la scène artistique portugaise
à Paris entre janvier et août 2016. Il est organisé conjointement par la Fondation
Calouste Gulbenkian à Paris, le Jeu de Paume, la Réunion des Musées
Nationaux-Grand Palais, la Cité de l’Architecture et du Patrimoine et
le Théâtre de la Ville.

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Juliao Sarmento, White Exit, Collection Galerie Daniel Templon, Paris, Bruxelles

FONDATION CALOUSTE GULBENKIAN
Délégation en France

Julião Sarmento. la chose, même – the real thing
20 janvier – 17 avril 2016 


L’exposition propose au visiteur un panorama de l’oeuvre
de Julião Sarmento, figure de proue de l’art contemporain
portugais dont la carrière fut d’emblée internationale.
Au fil des années, Julião Sarmento a développé une oeuvre
protéiforme, recourant tour à tour à la photographie, au dessin,
à la sculpture, la vidéo ou la performance, tout en maintenant
un lien étroit avec le texte, qu’il incorpore et assemble en
fragments à ses oeuvres. Son travail est marqué par la présence
iconique de la femme, égérie subtile et motif récurrent
énigmatique qui jalonne ses propositions.

Fondation Calouste Gulbenkian – Délégation en France
39, bd de La Tour-Maubourg
75007 Paris
01 53 85 93 93

 

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Helena Almeida, « Pintura habitada » [Peinture habitée] 1975, Collection Fundação de Serralves – Museu de Arte Contemporânea, Porto / Foto Filipe Braga. © Fundação de Serralves, Porto

JEU DE PAUMEHelena Almeida. Corpus.
9 février – 22 mai 2016

Considérée comme l’une des plus grandes artistes
contemporaines portugaises, Helena Almeida
(1934, Lisbonne) trouve dans la photographie un
moyen de combattre l’extériorité de la peinture.
Le point  de départ de son oeuvre est toujours son
corps, comme si elle ne cessait d’affirmer «ma peinture
est mon corps, mon corps est ma peinture».
Intitulée «Corpus», la rétrospective du Jeu de Paume
présente, pour la première fois en France,
les oeuvres les plus emblématiques de l’artiste,
allant de la peinture à la photographie en passant par
le dessin et la vidéo. 
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Teatro Azul [Théâtre bleu], Théâtre Municipal de Almada, Portugal (1998-2005), © Fernando Guerra / Atelier Contemporânea

CITÉ DE L’ARCHITECTURE ET DU PATRIMOINE

Les universalistes. 50 ans d’architecture portugaise
13 avril – 29 août 2016


Dans le cadre de la commémoration des 50 ans de sa délégation
en France, la Fondation Calouste Gulbenkian s’associe à la Cité
de l’architecture & du patrimoine pour co-produire une exposition
présentant un demi-siècle de la pensée et de la production architecturale
au Portugal. Revenant sur le contexte historique, culturel, social
et mondial, l’exposition présente cinquante projets architecturaux
sous forme de maquettes produites spécialement pour l’exposition,
de documents graphiques et de documents audiovisuels.

Cité de l’Architecture et du Patrimoine
1 Place du Trocadéro et du 11 Novembre
75116 Paris

 

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Amadeo de Souza-Cardoso, Lévriers, 1911 © Lisbonne, CAM / Fundação Calouste Gulbenkian

GRAND PALAIS

Amadeo de Souza Cardoso (1887-1918)
20 avril – 18 juillet 2016

Secret le mieux gardé de la culture portugaise, Amadeo de Souza-Cardoso
a vécu et travaillé entre Paris et Manhufe, au Nord du Portugal.
Proche d’artistes comme Amedeo Modigliani, Constantin Brancusi,
Alexander Archipenko, Juan Gris ou encore Robert et Sonia Delaunay,
Amadeo ne se revendique d’aucun mouvement esthétique. Influencé par
l’impressionnisme, l’expressionnisme, le cubisme et le futurisme, il refuse
cependant toute étiquette. Ses oeuvres se nourrissent d’un dialogue
constant entre tradition et modernité, associant recherches avant-gardistes
et relecture de thèmes iconographiques populaires. Cette exposition est
organisée par la Réunion des musées nationaux – Grand Palais et
la Fondation Calouste Gulbenkian.

 

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Teatro Praga : © Silverbox + Revista Gerador

THÉÂTRE DE LA VILLE

Teatro Praga. Projet Pessoa
31 mai – 4 juin 2016 / dans le cadre de
Chantiers d’Europe, 7e édition 

Les «nouvelles tendances théâtrales» ne sont pas l’apanage
des seuls pays d’Europe du Nord. A Lisbonne, voilà déjà
20 ans que les activistes du Teatro Praga sont à la manoeuvre. Logiquement invité dans le cadre des Chantiers d’Europe,
le Teatro Praga est de retour avec, dans ses bagages, Fernando
Pessoa. Autant dire un monument national, ici abordé avec
beaucoup de liberté et de fantaisie, dans une dramaturgie joyeusement hétéroclite qui fait resurgir l’enfance
du poète en Afrique du Sud. Un spectateur navigateur, qui suscite un kaléidoscope de voix occidentales et
africaines.PRINTEMPS CULT PORTUGAIS LOGO

 

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COIMBRA DOCARIA

« Une visite au Portugal » : un titre qui ne doit rien au hasard pour  le récit d’un séjour effectué dans ce pays en ce début d’automne 2015 et qui fut l’occasion de nouvelles, belles et intéressantes découvertes. Ce titre est en effet celui sous lequel a été publiée dans les années 1970 la traduction en portugais des souvenirs « couchés rapidement sur le papier » par un Hans Christian Andersen conquis, après son voyage au Portugal en 1866. Il se trouve aussi que ces « souvenirs » ont été réédités récemment par Colares Editora (collection Feitoria dos livros) pour laquelle j’ai écrit quelques textes, notamment la préface à une édition des Contos de Andersen. C’est d’ailleurs grâce aux recherches effectuées à cette occasion que j’ai découvert son périple au Portugal et le récit qu’il en avait publié. La boucle était bouclée… 

Coimbra est connue pour son université, une des plus anciennes d’Europe – on célèbre cette année son 725ème anniversaire – à l’ombre de laquelle la ville a grandi, s’est développée et a acquis sa renommée. Moins sans doute pour une manifestation qui depuis quelques années met à l’honneur un patrimoine d’un autre ordre avec la Mostra de Doçaria Conventual e Regional de Coimbra (festival de friandises des couvents et de la région de Coimbra). Autrement dit un festival de « douceurs », comme le suggère le mot « doçaria », dont la VIIème édition s’est déroulée les 3 et 4 octobre derniers. J’y suis allée précisément dans le sillage de Colares Editora qui, en raison de l’importance et de la qualité de ses publications sur la gastronomie, y est régulièrement invitée.

COIMBRA MOSTRA

La confection de ces « doces » traditionnels est un héritage des nombreux couvents que comptait jadis Coimbra. D’ailleurs la Mostra se tient dans l’un d’eux, celui de Sant’Ana, devenu entre temps caserne militaire, d’où la présence au premier abord déroutante de soldats en treillis au milieu des visiteurs déambulant sous les arcades de l’ancien cloître où sont installés les stands d’une bonne trentaine d’exposants. Triés sur le volet, ceux-ci proposent des produits fabriqués selon des recettes traditionnelles, essentiellement à base d’oeufs (les jaunes surtout), sucre, courge de Siam (gila)  et amandes. (1)

DOCARIA CONVENTUAL« Maintenir vivante la richesses des formes, des saveurs et des savoirs« , tel est l’objectif de la Mostra, créée à l’initiative de la Mairie de Coimbra. Car, comme le soulignent les organisateurs, ces recettes seraient « tombées progressivement dans l’oubli sans leur transmission orale ou écrite au sein de quelques familles et le persévérant travail de chercheurs« . Au nombre de ceux-ci il faut citer Dina Fernanda Ferreira de Sousa,  auteure notamment d’une thèse de doctorat, A doçaria conventual de Coimbra, et responsable de l’organisation de la manifestation. (2) Laquelle est un moyen de diffusion de ce patrimoine et d’échanges, mais aussi d’encouragement à la qualité et à l’authenticité avec un concours auquel sont appelés à participer les exposants.

Inutile d’insister sur la tentation permanente qu’a constitué pour l’auteure de ces  lignes ce festival de délices pour la plupart inconnus d’un palais essentiellement familier jusque là des queijadas de Sintra et pastéis de nata de Belemmême s’il avait conservé le lointain et ineffable souvenir d’un de ces desserts issus de la tradition des couvents portugais, dégusté jadis dans un restaurant lisboète, O Conventual, hélas aujourd’hui fermé.

Bolinhol/Casa do Bolinhom/Kibom ©db

Bolinhol/Casa do Bolinhol/Kibom ©db

Avec des coups de coeur, comme le Bolinholune spécialité de Vizela. Un bel exemple de transmission familiale, de génération en génération, depuis sa création il y a plus d’un siècle par Joaquina Ferreira da Silva. Laquelle eu l’idée de revisiter la recette du Pão-de-Ló traditionnel (une sorte de gâteau de Savoie en forme de couronne) en « imaginant un petit gâteau emballé dans un linge » (3). Traduisons : un gâteau rectangulaire à la pâte très légère, aérienne dirons-nous, à base d’oeufs, sucre et farine, enrobé d’un fin glaçage au sucre. Un résultat fondant, au littéral et au figuré,  qui m’a rappelé le gâteau « Mousseline » maison de mon enfance. Réminiscence d’enfance aussi avec les « Jesuitas« , ces gâteaux de  fine pâte feuilletée, fourrés  d’une garniture légère à base de jaunes d’oeufs, de sucre et de cannelle et recouverts d’une fine pellicule meringuée. Très proche des « Allumettes » françaises, devenues rares aujourd’hui dans les boulangeries.

Sans oublier les « Bazófias« , sorte de macarons légers aux blancs d’oeufs, sucre et amandes, seule concession consentie à l’irrésistible étalage de gourmandises présentées par la Pâtisserie Briosa (Briosa Pastelaria) de Coimbra avec notamment ses meringues  – appelées si joliment au Portugal « Suspiros dos anjos » (soupirs des anges) – surdimensionnées et ses cakes, « Galantine de Frutas« , si riches en fruits confits.

L'empire de la tentation…©db

L’empire de la tentation…©db

Quant aux délicieux Rebuçados da Régua, ces bonbons fabriqués par Dulce Guimarães da Silva et son mari Gastão Queiros da Silva, selon une tradition  transmise de génération en génération depuis près de trois siècles, ils doivent leur couleur d’ambre clair et leur saveur complexe à un savant mélange de sucre, miel, citron et plantes aromatiques. Lesquelles? Nous ne saurons pas  …

CIDRAOFaire vivre des saveurs et des savoirs, c’est aussi réhabiliter des produits tombés  dans l’oubli, comme par exemple le cidrão. Cette sorte de  cédrat,  » très abondant et apprécié jadis, comme en témoigne sa présence dans les tableaux des XVIIe et XVIIIe siècles, a aujourd’hui quasiment disparu de notre pays, où seule son écorce confite est encore utilisée dans le bolo-rei (gâteau des rois) « , souligne Anabela Ramos, chercheuse auprès du monastère de São Martinho de Tibães. Lequel, devenu propriété de l’Etat, a entrepris de revaloriser la culture du cidrão et remettre au goût du jour la compote (cidrada) faite avec la pulpe du fruit. Après avoir dégusté  cette subtile « saveur bénédictine », on ne peut que saluer l’initiative… (4)

Enfin, pour n’oublier aucune des textures sucrées goûtées pendant ce festival de douceurs, on mentionnera encore les liqueurs fabriquées par la Casa de Encosturas. On n’a pu résister à celle de café, médaille d’or 2015. Ni non plus au nectar corsé qu’est le miel de la même maison, dont un pot est allé rejoindre la bouteille de liqueur – entre autre bonnes choses – dans la valise du retour…

Que le lecteur se rassure : on aura su s’arracher au jardin des délices pour aller à la rencontre de Coimbra et de son université. Et en contemplant le cours du Mondego, on aura attendu patiemment notre tour pour pénétrer dans l’imposante bibliothèque, où la nuit venue les livres sont placés sous la protection des chauves-souris … (5)

BIBLIOTHEQUE COIMBRA

(1) Gila (ou chila): Les courges de Siam se récoltent à complète maturité et se consomment cuites. À la cuisson, la chair devient filamenteuse (d’où son autre appellation de « courges spaghetti »).  On les prépare notamment en confiture. Celle-ci, connue sous le nom de « confiture de cheveux d’ange », est très utilisée dans la pâtisserie traditionnelle Portugaise.
(2) Dina Fernanda Ferreira de Sousa est également l’auteur de Arte Doceira de Coimbra, Conventos e TradiçoesReceituários (séculos XVII-XX). Les deux ouvrages ont été publiés par Colares Editora.
(3) En jouant sur Bolo:gâteau / Bolinho-petit gâteau et Linho : lin/tissu de lin
(4) Anabela Ramos a signé les textes de l’ouvrage Cidrão – Na história, no campo e na mesa, publié en 2014 par l’ATAHCA (Associação de Desenvolvimento das Terras Altas do Homem, Cávado e Ave)
(5)  » Je voudrais maintenant vous conter une histoire amusante. J’ai visité la bibliothèque de Coimbra, au Portugal. Les tables étaient recouvertes d’un drap feutré, un peu comme des tables de billard. Je demande les raisons de cette protection. On me répond que c’est pour les protéger de la fiente des chauves-souris. Pourquoi ne pas les éliminer ? Tout simplement parce qu’elles mangent les vers qui attaquent les livres. » (Umberto Eco, N’espérez-pas vous débarrasser des livres, (entretien avec Jean-Claude Carrière), Le Livre de poche/coll. biblio essais

Colares Editora // Feitoria dos livros
Rua Conde Ferreira, 30
2710-556 SINTRA / PORTUGAL
Tel: 00 351 21 923 25 98
Fax:00 351 21 924 38 35
Colareseditora@sapo.pt/feitoriadoslivros@sapo.pt

Université de Coimbra, aile nord © db

Université de Coimbra, aile nord © db

Avec quelque 4100 spectateurs, et la présence d’une quinzaine de réalisateurs, producteurs et distributeurs venus présenter leurs films, cette édition 2015 a été un très bon cru!
Le grand gagnant de l’année est une gagnante puisque c’est le film Bonne Chance de Carolina Jabor, qui a remporté le Prix du Public.
Carolna Jabor, réalisatrice de BONNE CHANCE, Prix du Public 2015 au Festival du cinéma brésilien de Paris !

Carolna Jabor, réalisatrice de « Bonne chance », Prix du Public 2015 /Festival du cinéma brésilien de Paris


A noter que 3 films de la sélection seront prochainement distribués en France
:
CASA GRANDE de Fellipe Barbosa – Sortie nationale le 3 juin 2015
Prix du Public, Prix FIPRESCI et Prix Découverte de la Critique française à Cinélatino, Rencontres de Toulouse 2014, Prix du Public au Festival de Janeiro.
UNE SECONDE MERE d’Anna Muylaert – Sortie nationale le 24 juin 2015 
Prix du Public et Prix CICAE au Festival de Berlin, Meilleure Actrice au Festival de Sundance
VENTS D’AOÛT de Gabriel Mascaro
Mention Spéciale au Festival de Locarno 2014, Meilleure Actrice et Meilleure Photographie au Festival de Brasilia 2014
Rendez-vous en 2016, pour la 18e édition du Festival du cinéma brésilien de Paris 

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Après le Salon du Livre, le Festival de Cinéma brésilien met en lumière à son tour la littérature brésilienne en proposant pour sa 17ème édition une sélection de films adaptés d’oeuvres littéraires. La musique sera également à l’honneur avec plusieurs films et documentaires, dont trois  consacrés à Maria Bethânia qui fête cette année ses 50 ans de carrière. Avec les films en compétition pour le Prix du Public ou hors compétition et les documentaires, ce sont au total plus de trente oeuvres qui sont  proposées au public de la grande salle du cinéma L’Arlequin, du 7 au 14 avril 2015.

Avec plus de 400 films  projetés à quelque 65 000 spectateurs depuis sa création, ce Festival du Cinéma brésilien de Paris constitue une occasion unique de découvrir la diversité de la production cinématographique brésilienne encore insuffisamment distribuée en France.

« Une seconde mère » (Que Horas Ela Volta ?) / DR

Les oeuvres présentées sont pour la plupart inédites, comme le film d’ouverture du Festival, Trinta (2014) de Paulo Machline, un documentaire long métrage consacré au grand carnavalesco Joãsinho Trinta, qui a donné au carnaval de Rio ses lettres de noblesse. le film sera projeté le 7 avril au soir en avant-première européenne en présence du réalisateur Paulo Machline et du scénariste Cláudio Galperin. Inédit également le film sur lequel se refermera le festival, Une seconde mère (Que horas ela volta?) de Anna Muylaert. Ce film a été récompensé à Berlin par le Prix du public du meilleur film et celui des cinémas d’art et d’essai (Cicae)  et a valu à Regina Casé le prix spécial du jury pour la meilleure actrice au festival de Sundance 2015. Il sera projeté en avant-première française en présence de la réalisatrice.

Dans l’intervalle, avec les huit films adaptés d’oeuvres littéraires, on aura pu découvrir (ou revoir) des véritables classiques du cinéma et de la littérature brésiliens :

FESTIVAL CINE BRESILIEN– À la gauche du père (Lavoura arcaica) de Luiz Fernando Carvalho (2001, d’après Raduan Nassar)
– Le Baiser de la femme araignée (O beijo da mulher-aranha)de Hector Babenco (1985, d’après Manuel Puig)
– Capitaines des sables (Capitães da areia) de Cecília Amado (2011, d’après Jorge Amado)
– Dona Flor et ses deux maris (Dona Flor e seus dois maridos) de Bruno Barreto (1976, d’après Jorge Amado)
– Histoire de Fausta (Romance da empregada) de Bruno Barreto (1987, d’après Naum Alves de Souza )
– Leçon d’amour (Lição de amor) de Eduardo Escorel (1975, d’après Mário de Andrade)
– Mon bel oranger (Meu pé de laranja lima) de Marcos Bernstein (2012, d’après José Mauro de Vasconcelos)
– Sécheresse (Vidas secas) de Nelson Pereira dos Santos (1963, d’après Graciliano Ramos)

Au nombre de huit également, sont les films en compétition pour le Prix du public (à l’issue de chaque séance, les spectateurs sont invités à déposer leur bulletin dans l’urne) :

« Absence » (Ausência) / DR

– Vents d’août (Ventos de Agosto) 2014 / Réalisation : Gabriel Mascaro
– Castanha, 2014 / Réalisation : Davi Pretto
– Jamais trop vieux pour miauler (Gata velha ainda mia)  2013 / Réalisation Rafael Primot
– Sang bleu (Sangue Azul) 2014 / Réalisation : Lírio Ferreira
– Bonne chance (Boa Sorte) 2014 / Réalisation : Carolina Jabor
– Absence (Ausência) 2014 / Réalisation : Chico Teixeira
– Casa Grande, 2014 / Réalisation : Fellipe Barbosa
– Tim Maia, 2014 / Réalisation : Mauro Lima
Ce dernier film, biographique, est un portrait de Tim Maia et de sa musique teintée de funk et de soul.

La musique, second thème de ce 17ème Festival, est aussi à l’honneur avec les documentaires consacrés à l’une de ses icônes, Maria Bethânia, qui fête cette année ses 50 ans de carrière.  Une carrière qu’évoquent trois films, réalisés en 1966, 1976 et 2014. L’occasion de se replonger dans l’histoire de la musique populaire brésilienne et de tous ceux qui l’incarnent aux côtés de la soeur de Caetano Veloso…
Sans oublier les deux films dédiés à l’univers de la samba : Les Dames de la Samba, de Suzana Lira et Samba & Jazz, de Jefferson Mello.

Pour en savoir plus sur tous les films du festival (bien évidemment projetés en VOSTFR) et les horaires, ainsi que sur les invités,  cliquer ici 

Maria Bethânia / DR

Maria Bethânia / DR

Cinéma L’Arlequin
76 Rue de Rennes
75006 Paris
01 45 44 28 80

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« GUERRE ET PAIX », l’oeuvre monumentale de Cândido Portinari  exposée au Grand-Palais

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L’imposant diptyque “Guerre et Paix”, réalisé entre 1952 et 1956 par le peintre brésilien Cândido Portinari (1903-1962), fait une halte dans le Salon d’Honneur du Grand-Palais, avant de retrouver le siège de l’ONU à New York où cette oeuvre, don du gouvernement brésilien aux Nations-Unies, est installée depuis 1957. La présentation à Paris de « Guerre et Paix » avec quelque 40 études préparatoires et un regard sur l’ensemble de son oeuvre,  permet d’aller à la rencontre d’un des principaux artistes brésiliens du XXe siècle. Cette exposition est organisée par le Projet Portinari. Lancé en 1979 par João Cândido Portinari, fils unique du peintre, à la faveur du retour à la démocratie après 15 ans de dictature militaire au Brésil, ce projet est destiné à recenser et valoriser l’œuvre de de l’artiste engagé que fut Cândido Portinari. À voir jusqu’au 9 juin 2014 (entrée gratuite). 

Le sujet, Guerre et Paix, a tout du défi, l’oeuvre que lui a dédiée Cândido Portinari le relève, par ses dimensions – deux panneaux de 14 mètres de hauteur sur 10 mètres de largeur – et son propos : son universalité s’exprime par le biais de ce qui a toujours été au coeur de la création de l’artiste, le peuple brésilien.

Dans les quelque 5000 toiles que Cândido Portinari a réalisées, il a décrit  tout aussi bien le dur labeur des plantations de café que les héros nationaux ou les déplacés de l’intérieur, misérables, à la recherche d’un travail. Ce sont les souffrances de ce peuple qui font la matière essentielle du volet La Guerre. Une souffrance qui s’exprime surtout par les femmes, pleurant la mort de l’enfant décharné ou implorant quelque justice ou répit dans ce monde qui les broie, traversé par les quatre cavaliers de l’Apocalypse, semant la mort sous toutes ses formes – le fer, la faim, les bêtes sauvages… Une version d’inspiration cubiste et colorée des « désastres de la guerre »…

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Cândido Portinari, « Guerre » © DR

Cândido Portinari,

Cândido Portinari, « Paix »

En contrepoint,  La Paix met en scène des enfants bien vivants en train de jouer; ils sautent, se balancent, font le poirier, chantent en choeur … Les femmes sont debout, rassemblées en cercle ou dansant. Le rouge éclatant de quelques robes illumine le tableau. Les hommes discutent. les animaux participent de cette joie paisible…

Et, le comble,  Portinari ne pourra même pas assister l’année suivante à l’inauguration de son oeuvre, offerte par le gouvernement brésilien à l’ONU, son visa pour les Etats-Unis lui ayant été refusé en raison de ses liens avec le  parti communiste brésilien, auquel il avait adhéré en 1945. (1)

Cândido Portinari,

Cândido Portinari, « Mort », Huile sur bois, 1958 / Coll. James Lisboa

C’est à l’occasion de la rénovation du lieu qui l’abrite depuis 1957 au siège des Nations Unies à New-York, que le diptyque a pu être exposé au Brésil et en France, après avoir fait l’objet lui aussi d’une restauration, les couleurs de « Paix » s’étant décolorées et l’ensemble ayant besoin d’être rafraîchi.

Il fallait les dimensions du Salon d’Honneur du Grand Palais pour accueillir cette oeuvre  imposante, mise à l’honneur dans une scénographie jouant sur l’ombre et la lumière.(2) Outre le diptyque, sont également exposées une quarantaine d’études préparatoires, dessins et peintures, ainsi que d’autres oeuvres issues de collections publiques et privées. Des vidéos complètent la visite, retraçant notamment la genèse de l’oeuvre et  le « Projeto Portinari », grâce auquel on peut voir défiler en continu la quasi totalité de l’oeuvre de l’artiste, dans un espace dédié.

Car jusqu’à ce que soit lancé en 1979 ce projet mené par le fils unique de Portinari, le public avait accès à seulement 5% des oeuvres signées de celui qui en 1958 avait été le seul artiste d’Amérique Latine invité à l’exposition 54 ans d’Art moderne à Bruxelles et dont le tableau « Enterro na rede » (Enterrement dans un hamac) avait été choisi pour figurer parmi les 100 chefs-d’œuvre du siècle. L’essentiel des oeuvres était détenues par des particuliers un peu partout dans le monde.  Outre l’inventaire de quelque 25 000 documents, dont 6000 lettres et 1200 photographies, et la collecte de 130 heures de témoignages, le projet a catalogué 5 000 œuvres dans une publication en cinq volumes datant de 2004. Ces documents sont devenus accessibles avec la création en 2013 d’un « Portail Portinari » sur internet.

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(1) Cândido Portinari se présente comme candidat du PCB aux élections au Congrès en 1947. Il manquera de peu d’être élu. En novembre de la même année, face à la répression exercée par le pouvoir  général Dutra contre un Parti communiste en progression,  il s’exile volontairement en Uruguay.
(2) On avait pu admirer le volume de ce Salon d’Honneur du Grand Palais, rouvert récemment au public, lors de l’exposition Cartier.

Portinari, exposition

Portinari, exposition « guerre et Paix » au Grand-Palais, au 1er plan, les lunettes de l’artiste © db

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                                       SAUDADE : Hommage à JOSÉ AFONSO au Théâtre de la Ville

JOSEAFONSO AFFICHELe 25 avril 1974 , une chanson, Grândola Vila Morena, enregistrée trois ans plus tôt en France par José Afonso, donnait le signal de la Révolution des Oeillets au Portugal. 
En novembre 1981, José Afonso était  au Théâtre de la Ville à Paris pour une série de cinq récitals.  Sur cette même scène un hommage lui a été rendu le 21 novembre 2012,  à l’occasion du 25ème anniversaire de sa mort.
Devant une salle comble mêlant les générations, une dizaine de chanteurs et musiciens, compagnons de route ou jeunes artistes, ont redonné vie aux mots et à la musique du poète engagé, le temps d’un unique  concert. 

O povo unido jamais será vencido… L’Histoire a régulièrement démenti le slogan scandé au fil des manifestations contre les dictatures selon lequel « le peuple uni jamais ne sera vaincu ». Mais les chants qui ont accompagné ces luttes pour la liberté, la fraternité, la dignité  et l’égalité continuent de porter ces valeurs qu’au delà de la nostalgie des heures où l’on a cru en leur possible réalisation on ne désespère pas malgré tout de voir un jour l’emporter durablement sur « les eaux glacées du calcul égoïste« … Les chansons de José Afonso sont de cet ordre, à commencer par l’emblématique Grândola Vila Morena, devenue avec la Révolution des Oeillets, un hymne au-delà des frontières du Portugal.

Et l’émotion fut à nouveau là, lorsqu’à la fin du concert parisien les artistes se sont rassemblés sur la scène, pour l’écouter, tandis que le public, dès les premières mesures, se levait pour redire, avec José Afonso, que dans Grândola, la ville brune, terre de la fraternité, c’est le peuple seul qui commande… (1)

Le monument dédié à José Afonso à Grândola / © DR

Le monument dédié à José Afonso à Grândola / © DR

Grândola n’est pas imaginaire, José Afonso a connu cette bourgade de l’Alentejo, cette région rurale du sud du Portugal, bastion de la résistance à la dictature et longtemps fief du Parti communiste. Mais, comme le rappelait opportunément la petite exposition organisée  dans le hall du Théâtre de la Ville,  José  Afonso, né en 1929,  a grandi, s’est formé dans la diversité des sols du Portugal et de ses colonies ultramarines, une diversité qu’il exprimera dans ses chansons.

Au terme d’une enfance partagées entre le Portugal, l’Angola et le Mozambique, il poursuit des études secondaires et universitaires à Coimbra, où il commence à chanter, en 1949. il a vingt ans. Il ne cessera plus, évoluant du fado à la ballade avant de s’engager, à partir du début des années 1960, dans « la chanson d’intervention politique ». Il enregistrera d’abord au Portugal, avant que la censure ne l’oblige à préférer Londres ou en Île-de-France – Hérouville – en 1971 pour l’album Cantigas de Maio, où figure Grândola Vila Morena.

CANTIGAS DO MAIOLe choix des chansons  pour cette soirée hommage au Théâtre de la Ville, reflétait cette diversité d’inspiration. De Cantigas do Maio, interprétée par  João Afonso, le neveu de l’auteur, né au Mozambique où il a grandi, à Menino do Bairro Negro (Enfant du quartier noir) dans la voix de la Cap-verdienne Mayra Andrade -« à la base, je ne suis pas portugaise« , dira-t-elle joliment avant de commencer à chanter. (2)

En l’écoutant, on se dira que finalement, cette langue portugaise aura été un beau legs… En passant par Balada do Outono(Ballade de l’automne) dans la voix de Antônio Zambujo. Cet artiste, né dans l’Alentejo et qui appartient à la nouvelle génération du fado signe un texte où il  exprime son admiration « Zeca » Afonso, et l’influence qu’il a eu sur son propre parcours. (3)

De gauche à droite : Janita Salome, Carlos Salome, José Afonso et Júlio Pereira en concert /© DR

De gauche à droite : Janita Salome, Carlos Salome, José Afonso et Júlio Pereira en concert /© DR

Le concert aura commencé par une belle et émouvante interprétation a capella de Utopia (cette cité sans murailles ni créneaux, où les hommes sont égaux au dedans comme au dehors… ) par Francisco Fanhais, compagnon de lutte de José Afonso. (4) Le musicien et compositeur Julio Pereira, qui fut aux cotés de José Afonso, notamment sur la scène du Théâtre de la Ville  en novembre 1981, assurait la direction musicale de ce concert anniversaire avec deux musiciens de son groupe, le guitariste Miguel Veras et le percussionniste Marcos Alves. Sans oublier Yara Gutking,  la « voix » du groupe qui a interprété notamment Senhor Arcanjo.

Au total une bonne quinzaine de chansons ont été offertes à un public vibrant, au fil d’un concert sans fioritures, hommage sobre et chaleureux rendu à l’artiste disparu en 1987, mais dont l’engagement et les chansons restent vivants. Et plus que jamais en ces temps calamiteux où le peuple portugais doit se battre à nouveau pour la dignité et la démocratie.

De cette soirée je garderai aussi le souvenir de ces deux hommes d’âge mûr qui, passant devant le Théâtre de la Ville, se sont arrêtés pour se photographier à tour de rôle avec leurs téléphones portables sous le portrait de José Afonso affiché sur la façade.

Sur un mur de Lisbonne en 1980… / © db

Sur un mur de Lisbonne en 1980… / © db

Le concert a été diffusé en direct et accès libre sur Mediapart .
Pour le visionner, cliquer ici 

(1) En voici les paroles :
Grândola, vila morena /Terra da fraternidade/O povo é quem mais ordena/Dentro de ti, ó cidade/Dentro de ti, ó cidade/O povo é quem mais ordena/Terra da fraternidade/
Grândola, vila morena/Em cada esquina um amigo/Em cada rosto igualdade/
Grândola, vila morena/Terra da fraternidade
À sombra duma azinheira/Que já não sabia a idade/Jurei ter por companheira
Grândola a tua vontade

Grândola ville brune/Terre de la fraternité/C’est le peuple qui commande/
dans tes murs ô cité
A chaque coin de rue un ami/Sur chaque visage l’égalité/Grândola ville brune/
Terre de la Fraternité
A l’ombre d’un chêne vert/Dont je ne savais plus l’âge/
J’ai juré d’avoir pour compagne/ Grândola ta volonté

(2)  Mayra Andrade sera à l’affiche d’un concert unique au Théâtre de la Ville, le 15 février 2013
(3) Le dernier album de Antônio Zambujo, Quinto (harmonia mundi/world village),  a été primé « Disque d’or » au Portugal.
(4) Né en 1941, ce prêtre engagé, poursuivi par la Pide, (la police politique de la dictature), interdit de chanter et d’enseigner, émigrera en France au début des années 1970 pour ne revenir au Portugal qu’après la Révolution des Oeillets. Il participera à quelques concerts et enregistrements publics de José Afonso, en Italie et au Portugal.

O POVO E QUEM MAIS ORDENA

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                                               À Lisbonne : Sous les pavés, l’info…  

Les fameux petits pavés noir et blancs de calcaire et de basalte des rues lisboètes, signature de la ville, se transforment en QR Code dans le quartier du Chiado et auprès des grands monuments… Une manière ingénieuse de concilier patrimoine et nouvelles technologie avec ces codes-barres new wawe qu’on voit fleurir un peu partout.  Avec leurs modules noirs disposés dans un carré à fond blanc, ils  permettent de stocker des informations qu’on peut lire à partir d’un smartphone. En l’occurrence c’est à  des informations sur l’histoire de la ville et sur les sites touristiques que ces codes permettent d’accéder. 

De l’info « taillée dans le marbre », si l’on peut dire… une manière aussi pour Lisbonne qui a accueilli quelque 4 millions de visiteurs en 2011, de miser encore un peu plus sur le tourisme en ces temps d’une austérité qui suscite de plus en plus la colère – et c’est tant mieux – de ceux qui la vivent au quotidien.

Mais peut-être  l’installation de ces QR code (1) –  cet ambient marketing dans l’air du temps –  aura-t-elle permis de donner du travail à quelques artisans/ouvriers de la pierre … (2) et aussi aux employés de l’agence MSTF Partners à qui l’Office de tourisme du Portugal a confié cette campagne. Laquelle déborde la frontière puisque quelques pavés lisboètes exportés à Barcelone auront permis de recréer un QR code dans la cité catalane.  Sachez qu’en le scannant vous pourrez peut-être gagner une nuit gratis à Lisbonne … Et découvrir la ville et … ses pavés!

(1) Le code QR ou « flash-code » est un type de code-barres en deux dimensions (ou code matriciel datamatrix).  En anglais, QR est l’abréviation de Quick Response, signifiant que le contenu du code peut être décodé rapidement. Destiné à être lu par un lecteur de code-barres, un téléphone mobile, un smartphone, ou encore une webcam, il a l’avantage de pouvoir stocker plus d’informations qu’un code à barres1, et surtout des données directement reconnues par des applications, permettant ainsi de déclencher facilement des actions comme, par exemple naviguer vers un site internet, ou mettre l’adresse d’un site en marque-page… (source Wikipedia)

(2) Pour les voir (un peu) à l’oeuvre, cliquer ici 

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CINEMA :         Historias (les histoires n’existent que lorsque l’on s’en souvient) …

… les films aussi a-t-on envie de dire ! Pour son premier long métrage de fiction, la Brésilienne Julia Murat a réalisé un très beau film, plébiscité par le public qui lui a attribué son prix lors de l’édition 2012 du Festival de cinéma brésilien à Paris. 

Dans un village brésilien au milieu de nulle part, où les habitants peu nombreux et âgés ont fait de chaque jour la répétition du précédent, l’arrivée d’une jeune  photographe va troubler ce quotidien figé, surtout pour la vieille femme qui l’héberge. Sur une trame fictionnelle ténue, le film est une réflexion poétique sur le temps qui passe, l’oubli, la mort et le rôle de l’image…

… et celle du film est belle, signée par Lucio Bonelli. Cela commence dans une pénombre éclairée, à la de La Tour, avec de longs plans fixes sur une vieille femme dont on accompagne le réveil et les gestes : elle pétrit puis cuit des petits pains. Puis on suit sa démarche incertaine panier au bras entre les rails d’une voie de chemin de fer désaffectée, où la végétation a repris ses droits.

Les petits pains sont destinés à la boutique d’Antônio, où il n’y a plus grand-chose à vendre. Madalena, comme chaque jour nettoie la grille du cimetière qu’on n’ouvre jamais,  va écouter le sermon du prêtre puis déjeuner avec les quelques autres habitants du village. Le soir, elle retourne à la maison, par le même chemin. Image inversée. elle ne manquera pas d’écrire la lettre rituelle au mari défunt, qui s’en ira rejoindre les précédentes dans un grand panier…

Un soir, au retour, une jeune femme l’attend. On ne saura jamais vraiment pourquoi et comment elle est arrivée là. Elle demande à Madalena de l’héberger. L’attitude sera au départ désinvolte, voire sans-gêne ; le regard amusé, distant. Puis la communication va  s’établir peu à peu entre les deux femmes qu’un demi siècle sépare et bien d’autres choses… Au fil du dialogue – très peu bavard – qui se noue, Madalena va se laisser regarder et capter par l’objectif de Rita, et se regarder enfin elle-même, telle qu’elle est devenue, dans une beauté travaillée par le temps. L’actrice Sonia Guedes (née en 1932) assume avec une vérité digne et touchante ce passage du temps.

Rita (Lisa Favero) et Madalena (Sônia Guedes) / DR

Avec Madalena comme sauf-conduit et bientôt complice tacite,  Rita, interprétée subtilement par Lisa Favero, va découvrir le village et ses habitants, dont Antônio (impeccable Luiz Serra) : « Qu’est-ce qu’elle vient faire ? », « Je ne sais pas », répond Madalena.

Finalement, là aussi des paroles vont s’échanger et la grille du cimetière s’ouvrir. Avec Madalena la photo va permettre l’évocation plus intime du souvenir, des historias, qui n’existent que si l’on s’en souvient. Et dans ce village où « on oublie de mourir », Madalena va s’en aller paisiblement…

Et Rita repartir…  « Ma fille, il n’y a plus personne pour faire le pain », le film, l’histoire, s’achève sur ce constat des villageois en forme de supplique…

Le film, co-production Argentine-Brésil-France, prix du Public au  Festival de Cinéma brésilien de Paris 2012 et sorti sur les écrans le 18 juillet, n’est programmé que dans deux salles parisiennes (Le Nouveau Latina et l’Espace Saint-Michel) et dans trois salles de province à Grenoble, Perpignan et Strasbourg. Il n’y restera peut-être pas longtemps…. Il serait dommage de le rater…

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                           Le BRESIL, invité du festival des arts EUROPALIA à Bruxelles 

Tarsilo do Amaral, Operarios / Acervo artistico cultural dos palacios do governo do Estado de São Paulo,

Pour sa 23e édition, la Biennale des arts Europalia est consacrée  au Brésil. Du 4 octobre 2011 au 15  janvier 2012, Bruxelles va vivre aux couleurs de la culture brésilienne au fil de plusieurs centaines de manifestations – expositions, concerts, spectacles vivants, rencontres – placées sous le thème de la diversidade. Le coup d’envoi est donné mardi 4 octobre avec l’inauguration de la grande exposition  Brazil.Brasil au Palais des Beaux-Arts, en présence du Roi et de la Reine de Belgique et la Présidente de la République fédérale du Brésil Dilma Rousseff.
Les précédentes éditions du festival, consacrées à la Russie et à la Chine, ont accueilli chacune plus d’un million de visiteurs.

Au programme de cette nouvelle édition, figurent plus de 600 événements (expositions, concerts, spectacles de danse et de théâtre, conférences, rencontres littéraires et cinéma), 2650 œuvres d’art, un millier d’artistes et d’experts brésiliens et des centaines d’œuvres et artistes européens, dans quelque 200 lieux culturels en Belgique, mais aussi en France, aux Pays-Bas et en Allemagne.

Henrique Oliveira, Tapumes, 2006

EXPOSITIONS : Au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, deux expositions phares illustreront l’évolution de l’art brésilien depuis le 19e siècle jusqu’à nos jours. Brazil.brasil, l’exposition historique, retrace l’évolution de la vision des artistes brésiliens sur leur pays, à la recherche de l’identité brésilienne, de la monarchie à la modernité, entre 1808 et 1950.  Tandis que Art in Brazil (1950-2011), l’exposition contemporaine et suite chronologique de Brazil.Brasil, proposera une perspective brésilienne sur l’évolution et la révolution dans l’art brésilien des années 1950 à nos jours.

Indios no Brasil, au Musée du Cinquantenaire, se consacrera à l’art des peuples indigènes du Brésil et reflétera la diversité de leur esthétique : ornementations et objets,  chant et  danse.

Joseph Leon Righini, Residencia as margens do rio Anil

Terra Brasilis, à l’Espace culturel ING, se focalisera sur la fascination qu’ont exercée les exubérantes faune et flore brésiliennes et l’influence réciproque entre l’Europe et le Brésil dans leur découverte, valorisation et exploitation depuis le début du 16 e à la fin du 19 e siècle.

Une vingtaine d’autres expositions aborderont la photographie contemporaine et historique, l’architecture brésilienne, le carnaval, l’art afro-brésilien, le design, l’art graphique brésilien …

Côté MUSIQUE, en Belgique, en France et aux Pays-Bas, 170 concerts présenteront quelques-uns des 200 styles musicaux développés au Brésil dans un programme musical impressionnant où les grands noms côtoieront les étoiles montantes: Tom Zé, CéU, Naná Vasconcelos, Hermeto Pascoal, Teresa Cristina, Tulipa Ruiz et des centaines d’autres artistes.

Grupo Corpo/ Photo Luiz Pederneiras

Pour les ARTS VIVANTS, Ce sont plus d’une centaine de spectacles avec quelque 350 professionnels brésiliens issus d »une dizaine de compagnies de théâtre, d’autant de danse et deux de cirque, qui seront proposés au public.  Comme pour la musique, cohabiteront de grands noms aux côtés d’artistes moins connus en Europe. Citons notamment Enrique Diaz, Cibele Forjaz, Pia Fraus, Lia Rodrigues, Grupo Corpo, Membros, …

Conférences, débats, cinéma et de nombreux écrivains brésiliens viendront compléter l’affiche. Le club.brasil, décoré par l’artiste Marcello Dantas et situé au pied du Mont des Arts, en plein cœur de Bruxelles, fait depuis le 15 septembre office de centre d’information du festival. Mais c’est également un lieu de rencontre, centre de documentation, salle de spectacles gratuits (concerts, cours de danse et ateliers) et restaurant-bar à cocktails…

Le programme complet du festival est disponible sur le site internet www.europalia.eu

  • Par ailleurs, Embratur, l’Office du tourisme brésilien, met en place une animation de films 360° en plein cœur de Bruxelles à l’occasion d’Europalia.Brasil. Les visiteurs pourront pendant 10 jours s’immerger dans 5 territoires brésiliens aussi différents les uns que les autres. Pour ceux qui ne peuvent se rendre à Bruxelles, les films sont accessibles via www.braziltour360.c
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                             SUR LA ROUTE … DU VIN DE PORTO

Oliveiras na pauta, Régua,2008/JMF/Courtesy Galerie PHOTO4-2011

La Galerie PHOTO4 à Paris présente Par la vallée du Douro, des photographies de José Miguel Ferreira réalisées entre 2008 et 2010 au nord du Portugal, au long du Douro, le fleuve sur les rives escarpées duquel est né le vin de Porto. Du Haut-Douro à la ville qui a donné son nom au célèbre breuvage, l’artiste a saisi paysages et lieux avec une grande intensité poétique. Comme les vers de A.M. Pires Cabral qui accompagnent les photos de l’ouvrage La Route du Vin de Porto, publié à cette occasion.
A voir jusqu’au 7 mai 2011.

Des paysages entre terre et ciel ou des lieux le plus souvent sans présence humaine, des clichés  en noir et blanc subtilement tirés vers le sépia donnent aux photographies de José Miguel Ferreira un caractère à la fois instantané et intemporel et par là, éminemment poétique. D’ailleurs s’agit-il bien de photographies ? Pour certaines, on pourrait en douter, tant les tirages platine/palladium sur papier coton faits main par leur auteur, les rapprochent de la gravure ou de l’encre.

La vigne est bien sûr omni présente dans ce cheminement au fil du Douro, adaptant son tracé géométrique au cours sinueux du fleuve. A moins que tombée en déshérence, elle n’ait laissé place à une végétation touffue brouillant l’alignement des terrasses. Tandis qu’à l’opposé, les tout nouveaux plants de vignes dessinent sur le coteau des zébrures qui frisent l’abstraction.

Quinta do Panascal, 2008/JMF/Courtesy Galerie PHOTO4-2011

« Vignes mortes.
Le souvenir des sarments
sur les étroites terrasses qui perdurent,
Affronts
De la frêle créature semblable
Aux dieux du désordre.

Une clameur encore audible, un
Conglomérat de plaies.
Le vin moribond.

Lieux de cistes et d’abomination. » (1)

Il arrive que des ombres – reliefs ou nuages – ajoutent leurs formes éphémères aux tracés multiples du sol cultivé. Comme souvent dans les vallées le paysage envahit tout le champ de vision à l’exclusion du ciel, lequel parfois réussit à s’imposer, comme pour mieux dessiner des silhouettes d’oliviers sur une crête ou mettre en évidence une étendue de plaine.

Paisagem do Douro IV, 2008/JMF/Courtesy Galerie PHOTO4-2011

Des paysages très peu habités. Dans l’exposition, une seule photo montre un homme, de dos, cadré de la taille à la nuque, poings sur la taille… Une posture qui suggère l’observation et la réflexion sur le travail fait ou à faire, certainement au moment des vendanges, comme la série qu’on peut voir dans le livre La Route du vin de Porto. (2) Là aussi ce sont les gestes qui sont captés – main laissant tomber la grappe cueillie dans le panier – jamais le corps en son entier.

Les photos urbaines ne sont pas davantage habitées. Si l’on devine la vie derrière les fenêtres des maisons vues du Pont D. Luis à Porto, les escaliers des ruelles qui mènent au fleuve sont déserts, comme l’immense place devant les églises flanquées d’un palmier. Il est vrai qu’il vient de pleuvoir, comme en témoigne le pavé brillant.

Une exception, toutefois : le hall de la gare de São Bento à Porto, saisi en contre jour de la lumière filtrant par les imposantes verrières.  On y devine à peine les fresques qui ornent les murs, tandis que les portes ouvertes laissent voir les façades du bâtiment d’en face baignées de soleil. Difficile de vider une gare de ses voyageurs, aussi les voit-on, silhouettes tronquées dont on n’aperçoit guère, tout au bas de la photo, que les épaules et le dos, pressées vers la sortie, les quais ou le point de fuite du tableau, serait-on tenté de dire. D’autant qu’un des rares personnages de face, une femme, reçoit la lumière à la manière d’un Vermeer…

Il faudrait aussi parler de la musique, celle de Mozart, qui a inspiré le photographe, alors qu’il parcourait la région au volant de sa fourgonnette. Le concerto pour clarinette (KV622) a en quelque sorte sublimé son regard. « Je donne libre cours aux sensations que j’éprouve, je me laisse absorber par la musique, par les montagnes, par les arbres et par les rares fleurs que l’on voit encore à cette période de l’année », écrit José Miguel Ferreira.

Il y a la mer aussi. Cet océan vers lequel coule le fleuve, vers lequel le Portugal est tout entier tourné, sur lequel tant de Portugais se sont lancés, et avec lequel José Miguel Ferreira entretient apparemment une relation complexe. « La mer m’a rejeté il y a bien des années (…) L’océan m’a rejeté avec tendresse et mépris », écrit-il dans l’introduction au livre. Peut-être est-ce la raison pour laquelle il vit depuis de nombreuses années hors du Portugal, en Suisse. Et peut-être aussi celle qui l’a fait revenir avec ces images sensibles capturées sur la route du vin de Porto…

Nova vinhas no Douro, 2008/JMF/Courtesy Galerie PHOTO4 -2011

1) A.M. Pires Cabral, Douro : pizzicato e chula
(2) Publié par les Editions au Pont des Arts / Charles Zalber

                                      PHOTO4  4 rue Bonaparte-Paris VI  Tel. 01 43 54 23 03

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                                      « Are you ready Lola? » : Peintures de Lisa Santos Silva

Lisa Santos Silva, « Are you ready Lola? » / Photo Charles Duprat

Le Centre culturel Calouste Gulbenkian à Paris expose une vingtaine d’œuvres récentes de Lisa Santos Silva, réunies sous le titre Are you ready Lola ? C’est l’occasion de découvrir cette artiste portugaise, installée dans la capitale depuis la fin des années 1970. Portraits de femmes  intemporels et indéchiffrables – mais nourris de références picturales explicites – ou paysages « atmosphères », ces toiles troublantes ne laissent pas indifférent.
A voir jusqu’au 22 avril 2011.

Le titre de l’exposition, Are you ready Lola ?, qui est aussi celui d’une des plus récentes peintures de l’artiste, nous aiderait-il à déchiffrerles œuvres de Lisa Santos Silva présentées au Centre culturel Calouste Gulbenkian ?

Les cinéphiles auront tout de suite saisi la référence au célèbre film de Max Ophüls, Lola Montès, inspiré par la vie de la célèbre danseuse et courtisane du XIXe siècle qui eut pour amants Franz Liszt et Louis Ier de Bavière, avant d’en être réduite à mimer l’histoire de sa vie dans un cirque. Are you ready Lola ? est la question rituelle posée à Lola (Martine Carol) par le directeur du cirque (Peter Ustinov) avant qu’elle ne s’élance sur le trapèze. Un moment suspendu, d’attente et d’inquiétude… C’est aussi l’équivoque du personnage, femme jadis splendide et aimée, contrainte à « jouer », à répéter indéfiniment son passé, dans un présent sordide où elle n’est plus elle-même.

Lisa Santos Silva, « La Grande Ménine » / Photo Charles Duprat.

Temps suspendu, équivoque, répétition : tout cela est présent dans l’œuvre peint de Lisa Santos Silva. Les visages des femmes se ressemblent tous, inexpressifs, vidés de leur substance, presque floutés, tandis que seul le vêtement donne une présence, une identité à leur corps :  une religieuse, une courtisane, une ménine vélasquézienne, une papesse… « D’ailleurs, n’étaient-ce les accessoires – robes, nœuds, boucles d’oreilles, coiffes et coiffures, croix – on ne dirait pas qu’il s’agit de portraits de femmes », souligne Isabel Carlos, directrice du Centre d’Art moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian à Lisbonne, et commissaire de l’exposition parisienne.

Lisa Santos Silva, « Ecce » / Photo Charles Duprat

Cela est encore plus troublant dans la sérieEcce où le même visage subvertit le sens religieux du sujet biblique Ecce Homo. Cette subversion est aussi à l’œuvre dans les deux portraits La Religieuse et La Petite Religieuseou dans le portrait de ce qu’on identifie comme une « papesse », en dépit de la dérision du titre, Les Poissons rouges, en référence à l’imprimé de la robe… Isabel Carlos y voit un « écho de la conscience féministe au sein de la culture portugaise […]. Féminisme et religion, un mélange aussi explosif que les rouges de l’artiste ».

Des rouges passion qui tranchent sur l’atonie des visages et éclatent tout particulièrement avec l’accrochage des tableaux dans les espaces parisiens du Centre culturel Calouste Gulbenkian. Notamment au rez-de-chaussée de ce vaste hôtel particulier (1)  où l’on peut apercevoir les œuvres d’une salle à l’autre, comme enchâssées dans les boiseries et dorures des portes.

Lisa Santos Silva, « Adieu les Colonies » / Photo Charles Duprat

Changement de registre chromatique et pictural – avec une série de paysages intitulée Adieu les Colonies. Le fait que l’artiste, née à Porto, a passé toute son  enfance et son adolescence en Angola, « peut sans doute aider à expliquer non seulement le titre de cette série de paysages, mais aussi leur chromatisme et leur spatialité atmosphérique », suggère la commissaire de l’exposition. Effectivement, en l’absence de référence à des lieux précis et réels dans ces tableaux, et contrairement à la série des portraits où le sujet représenté s’impose et pose ses limites,  s’offre ici au regard une échappée possible vers un horizon plus lointain et peut-être nostalgique…

« Devant la peinture de Lisa Santos Silva, nous pouvons évoquer Goya, Vélasquez, l’école hollandaise, l’école flamande et aussi, par-dessus tout, le grand peintre de la chair et de la déformation qu’a été Francis Bacon. Mais les peintures de Lisa Santos Silva sont d’abord ses peintures, des épines contemporaines plantées dans des corps anciens », conclut Isabel Carlos.

(1)  Située avenue d’Iéna, à proximité de l’Arc de Triomphe et des Champs Elysées, la résidence a été construite à la fin du XIXe siècle par l’architecte Sanson pour un financier et collectionneur. Calouste Gulbenkian, homme d’affaire d’origine arménienne et de nationalité britannique qui a fait fortune dans le pétrole,  l’achète en 1923 et la réaménage pour y abriter ses propres collections. Il y habitera jusqu’à la seconde guerre mondiale.  En1942 il s’installe à Lisbonne où il restera jusqu’à sa mort en 1955.

La Fondation Calouste Gulbenkian est une institution portugaise privée, créée en 1956 par volonté testamentaire de son fondateur.  Le Musée Gulbenkian, inauguré en 1969 à Lisbonne, accueille aujourd’hui l’intégralité de sa collection, des antiquités égyptiennes aux créations de René Lalique. Tandis que Le CAM (Centre d’art moderne) héberge la plus importante collection d’art portugais du XXe siècle.

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French Brigadeiro au Café de la Paix : « le BRIC, c’est chic ! »

French Brigadeiro/DR

Le célèbre café parisien poursuit son exploration des pâtisseries made by Fashion Designers,avec une nouvelle collection, la sixième, faisant appel aux grands noms de la mode des pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). A charge pour chacun de  revisiter une gourmandise traditionnelle de son pays. C’est le Brésil qui ouvre le bal avec un French Brigadeiro, imaginé par le styliste Alexandre Herchcovitch. A déguster du 16 janvier au 15 mai 2011.

Un peu ému en présentant sa première création pâtissière, Alexandre Herchcovitch a tenu tout d’abord à préciser que Paris était la deuxième capitale, après Londres, où il avait fait un défilé au début de sa carrière, après avoir lancé sa marque en 1994.

Alexandre Herchcovitch et son French Brigadeiro / DR

« A travers ce dessert, une expérience très différente de ma vie de tous les joursj’ai voulu mêler les cuisines française et brésilienne », explique-t-il. Le Brigadeiro (brigadier), sorte de truffe à base de cacao en poudre, lait condensé sucré et beurre, est une confiserie très traditionnelle au Brésil (1). Cette « sucrerie favorite des gamins lors des fêtes d’anniversaire », Alexandre Herchcovitch a souhaité la rendre « plus légère avec une touche à la Française, en l’occurrence une mousse au chocolat et ses blancs battus en neige ». Le résultat : « une combinaison originale, un dessert franco-brésilien appelé French Brigadeiro ».

Ces pâtisseries fashion sont « à chaque fois un challenge », pour Christophe Raoux, le chef du Café de la Paix, et son chef pâtissier Dominique Costa. « A chaque fois on se creuse la tête et on essaie d’être le plus proche possible du créateur. Par exemple, ce dessert là (le French Brigadeiro) est à la fois très recherché et très épuré, explique Dominique Costa. On est resté sur le concept du ballon de foot ». Pour un représentant du pays par excellence du futebol, hôte de  la Coupe du Monde en 2014, il était loqique que quelque chose ressemblant  à un ballon de foot soit présent dans l’assiette du dessert…

Pour déguster le French Brigadeiro, il faut donc briser la sphère alvéolée qui l’entoure, posée sur un socle de sablé au chocolat à la fleur de sel. Le tout servi avec un surprenant granité de guarana, dont la fraîcheur acidulée vient opportunément soulager le palais. Car le Brigadeiro, même mâtiné de french touch, reste assez consistant !

On attend avec curiosité la suite des desserts de la saison  « Le BRIC c’est chic ! » qui verra se succéder, tout au long de cette année 2011 au Café de la Paix, Valentin Yudaskin (Russie), Manish Arora (Inde) et Frankie Xie (Chine)…

Le French Brigadeiro et son sorbet de guarana / Photo DB

(1) Le nom de cette confiserie vient du fait qu’elle a été abondamment servie par les partisans du Brigadier Eduardo Gomes, lors des deux campagnes électorales menées par celui-ci pour la présidence de la république. Un argument qui n’a pas permis au Brigadier de l’emporter face à ses rivaux, le géneral Eurico Gaspar Dutra en 1945 et Getúlio Vargas en 1950.

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Le scooter, icône urbaine, s’expose à Lisbonne
(Suite de la page d’accueil)

Photo DB

C’est dans le nouveau site du MUDE (Musée du Design et de la Mode), rua Augusta, au coeur de la ville basse, que sont exposés les scooters de la collection de João Seixas. L’édifice – une ancienne banque –  est encore en cours de rénovation, cloisons abattues et plafonds mis à nus. Les anciens comptoirs en bois massif  ont été heureusement conservés. Dans ce décor austère, les formes arrondies et les couleurs rutilantes des scooteurs n’en prennent que davantage de relief.

Quelques mots encore sur ce lieu où s’est récemment installé le MUDE,  dix ans après la création du Musée du Design au sein de ce qui était alors le tout nouveau et magnifique Centre Culturel de Belem (CCB). Le design, auquel s’est tout naturellement ajoutée la mode, s’expose désormais dans l’édifice qui abritait l’ancien siège de la Banque Nationale Ultramarine. Un édifice ancien donnant sur la voie centrale d’accès à  l’immense place débouchant sur l’estuaire du Tage.

Perspective vers le Tage, de la rua Augusta / Photo DB

Tout un symbole que cette rencontre entre l’univers « moderne » du design et de la mode, donc du style, avec cette partie  de la ville à laquelle le Marquis de Pombal a imprimé le sien, de style, en présidant à la reconstruction de Lisbonne après le tremblement de terre de 1755, dans un ordonnancement « moderne » pour ce qui témoigne désormais du passé de la ville.  Passé, présent, mouvement : comme le souligne Francisco Capelo, fondateur du Musée du Design et de la Mode de Lisbonne, le nouvel acronyme de celui-ci, MUDE, « entend signifier également Mudança (changement)« , à l’image des formes qui accompagnent l’évolution des sociétés.

S’il est un objet caractéristique d’une évolution de la société, c’est bien le scooter. Ce véhicule motorisé à deux roues, qui prend son essor dans les années d’après-guerre, correspond en effet à « l’idée d’une Europe moderne qui commence à prendre forme« , écrit Barbara Coutinho, la directrice du MUDE, dans l’introduction au catalogue de l’exposition.

Photo DB

La vai ela, formosa e segura …. Là elle va, belle et sûre : le titre poétique de l’exposition renvoit à la fois au personnage féminin de Leonor chanté par Camões et à sa réinterprétation des années 1960 par un poète moderne, Antônio Gedeão (1), mais aussi au genre féminin du mot scooter en portugais.

Double sens donc que ce féminin qui désigne le deux roues « icône médiatique d’une époque et d’un mode de vie urbain, jeune et démocratique« , comme aussi « l’ hommage galant à la femme nouvelle, plus émancipée et professionnellement active qui s’affirme au lendemain de la Seconde guerre (…) C’est à cette femme que s’adresse avec une attention toute particulière l’industrie, en lui offrant un véhicule à deux roues, rapide, économique, plus silencieux, compact,  pratique, peu coûteux, facile à conduire (même avec une jupe) et à garer, confortable, léger, coloré, élégant et séduisant« , résume Barbara Coutinho. Laquelle souligne que c’est « une philosophie similaire » qui présidera  au design de voitures comme l’Austin Mini anglaise ou l’indétrônable Fiat 500 italienne.

Comme aussi à la création des appareils ménagers électriques – aspirateurs, mixers, grille-pain, etc. – destinés à faciliter la vie domestique de femmes de plus en plus nombreuses à travailler à l’extérieur. Un échantillon éloquent de ces objets est présenté dans l’exposition.

Rien d’étonnant donc à ce que la publicité pour les scooters mette en avant les femmes, et pas seulement des pin-up en route vers la plage, mais des citadines en tenue de ville, conduisant par exemple leur garçonnet à l’école…. Sans oublier la princesse incognito du film Vacances romaines!

Quant au « Pourquoi » de cette collection rassemblée par João Seixas, lui même y répond en évoquant un environnement qui dès l’enfance l’a familiarisé avec l’architecture dans des maisons, à Lisbonne et à la campagne, réalisées par des grands architectes. Quand au mot « design », il était d’usage courant à la maison, avec un père « grand promoteur du design dans l’industrie« …

Mais « d’objets à deux roues et à moteur », il n’en n’était pas du tout question dans l’univers familial ! Ni non plus de collections. Pour João Seixas, « la vengeance fut tardive, mais significative« , avec pour commencer, une collection de motos anciennes, puis rapidement de scooters. Une collection qui sera facilitée par le fait que beaucoup de marques et de modèles de scooters ont été importés au Portugal. L’exposition en présente une bonne cinquantaine, issus des usines italiennes, bien sûr, mais aussi françaises, allemandes et portugaises…

L’originalité de l’exposition réside également dans le dialogue entre le design des scooters et celui des modèles de mode couvrant cette même période, des années 1940 aux années 1970. Ces pièces appartiennent à la collection permanente du musée, la collection design et mode de Francisco Capelo, à l’origine de la fondation du MUDE. Elles mettent en évidence la manière dont les grands créateurs – à commencer par Christian Dior – en révolutionnant la silhouette féminine, ont reflété et accompagné l’évolution de la société au lendemain de la Seconde guerre mondiale.

Couverture du catalogue de l’exposition

(1) « voando para a praia, na estrada preta. Vai na brasa, vai de Lambreta » (volant vers la plage, sur la route noire. Elle va sur sa Lambretta couleur de braise)

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Eraumavez, Il était une fois….

Je l’ai déjà dit par ailleurs (voir dans Birck à brac) : J’ai un tropisme certain pour les contes. C’est pourquoi, lorsqu’une amie éditrice au Portugal (Colares editora) eut l’idée, à la fin des années 1990, de publier des « classiques » du genre, dans le texte original et avec des illustrations d’époque, et me demanda d’en rédiger les pré- ou postfaces, j’ai immédiatement accepté.

Le petit chaperon rouge, illustration de Gustave Doré

C’est avec bonheur que je me suis replongée pour commencer dans l’univers des Contes de Perrault, le premier volume publié. Cette édition, respectueuse du texte initial illustré avec les gravures de Gustave Doré, a été bien accueillie. Et ce n’est pas sans plaisir, je l’avoue, que j’ai vu la postface qualifiée de  « délicieuse »  (« um postfacio delicioso« ), dans une critique…

C’était parti ! Suivirent A bela e o monstro, e outros contos (La Belle et la bête, et autres contes) de Mesdames de Beaumont et d’Aulnoy, les Contos de Andersen,  Contos de Grimm, avec aussi,  dans la même collection,  Os Desastres de Sofia (les Malheurs de Sophie), de la Comtesse de Ségur. Laquelle d’ailleurs se fit connaître d’abord par Les Nouveaux Contes de fées, au succès immédiat.

Les recherches pour rédiger ces textes d’accompagnement, furent prétexte à d’intéressantes découvertes. J’appris ainsi que les voyages effectués fréquemment hors du Danemark par Hans Christian Andersen l’avaient mené au Portugal et notamment à Sintra (siège de Colares editora). Le lieu le fascina : « On dit que tout le monde trouve une partie de sa patrie à Sintra. J’y ai trouvé le Danemark, et j’ai cru aussi y redécouvrir de nombreux endroits d’autres beaux pays »,  écrira-t-il dans le récit de son voyage, Uma Visita em Portugal em 1866.

Ou encore, la rencontre avec la correspondance enflammée de Madame du Deffand, qui, à 68 ans (nous sommes au XVIIIe siècle) et devenue quasiment aveugle, tomba éperdument amoureuse d’un Anglais original et provocant de vingt ans son cadet, Horace Walpole, homme fantasque et auteur fantastique… notamment de contes. [1] C’est en me penchant sur la vie de Madame de Beaumont, l’auteure de La Belle et la bête, que je découvris l’existence de cette correspondance… 2]

Plus récemment, et dans un autre registre, c’est un texte assez peu connu d’Oscar Wilde, A Alma humana (L’âme humaine),  qu’il m’a été donné de préfacer. Un texte d’autant plus étonnant que son titre initial est L’Ame humaine sous le socialisme… Son étude m’aura permis d’accéder à une autre perception  de l’auteur anglais,  « trop souvent réduit à l’écrivain mondain ou à l’homosexuel victime de la répressive morale victorienne »… En fait, Oscar Wilde était aussi « très engagé dans son temps, avec des centres d’intérêt multiples, dont la politique et les questions de société ».[3]

Pour cette édition portugaise, une visite s’imposait au cimetière parisien du Père Lachaise où est enterré Oscar Wilde. Des empreintes de rouge à lèvre déposées par des lèvres venues baiser la pierre tombale et des roses encore fraîches témoignaient de la ferveur d’adorateurs et adoratrices. Je fis des photos. Un détail de l’une d’elles illustre la couverture du livre.

L’aventure continue avec un nouveau projet de collection qui va me permettre d’explorer d’autres textes de la littérature française… A suivre…

En attendant : bonnes lectures, en français ou en portugais!

[1] Ses Contes hiéroglyphiques ont été publiés aux éditions Mercure de France, dans la collection Le petit mercure. (Tout comme la correspondance de Madame du Deffand A Horace Walpole).

[2] Et par cet effet d’entraînement qui fait que lorsqu’on s’intéresse à un sujet, notre esprit identifie tout à coup, « reconnaît » tout ce qui s’y rapporte, je mis la main sur un autre texte de Walpole, Le Château d’Otrante, un drame fantastique publié chez José Corti et préfacé par Paul Eluard.

[3] Le texte français de L’Ame humaine, est publié aux éditions Arléa.

Colares editora : Apartado 32 / 2711-997 Sintra-Portugal                                                         Telefone: (+351) 21-923 25 98 / Fax: (+351) 21-924 38 35

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