Accroché au flanc de la Croix-Rousse, au cœur de la ville de Lyon, le Village des Créateurs s’apprête à fêter son dixième anniversaire. Cette structure originale, financée essentiellement par les collectivités locales, a été créée en 2001 avec l’objectif de faciliter le développement de jeunes entreprises dans le secteur de la mode et, depuis 2008, du déco-design. En dix ans quelque 130 créateurs ont pu bénéficier du soutien du Village des Créateurs. Petite visite guidée …
C’est dans l’ancien quartier des canuts, les ouvriers de la soie, que le Village des Créateurs s’est installé, passage Thiaffait, au débouché d’une de ces fameuses « traboules », ces voies étroites traversant rues et bâtiments qu’empruntaient notamment les soyeux pour transporter leurs tissus à l’abri de la pluie. Le déclin de l’industrie lyonnaise de la soie a entraîné celui de ce quartier de la Croix-Rousse, dans le 1er arrondissement de Lyon, que la Ville s’emploie aujourd’hui à faire revivre. Un renouveau auquel contribuent le Village des Créateurs et les boutiques ouvertes alentour par d’anciens résidents – en relative déshérence, le quartier permet encore de s’installer à moindre frais dans les vastes espaces des anciens ateliers textiles.
La dizaine d’ateliers-boutiques du Passage Thiaffait accueille en résidence pendant 23 mois des créateurs mode et design sélectionnés par une commission d’agrément. A ces entreprises résidentes s’ajoutent celles que le Village accompagne, soit une soixantaine au total, et « sur ces soixante créateurs, aucun ne fait la même chose, tous avec une valeur ajoutée », tient à souligner Isabelle Gleize, la directrice du Village depuis 2003. On pourra le constater en visitant quelques-uns des résidents, à commencer par le duo de stylistes de la marque Les Tentativas, lauréats du concours Talents de mode 2010. Anthony Tentativa et Sharon Benson créent des collections de prêt-à-porter pour la ville, très « couture », où la qualité des tissus et une finition impeccable sont au service d’un « chic » simple mais très élaboré et de détails particulièrement travaillés.
Dans un tout autre registre, Bon Chic BonChien, marque de prêt-à-porter pour l’espèce canine ! Céline Boulud décline toute la gamme de vêtements et accessoires pour chiens, du manteau aux chaussures, en passant par le maillot de bain, des collections qu’elle réalise intégralement elle-même, du dessin à la vente. Et justement si elle a remporté le concours Talents de Mode en 2009, la créatrice le doit sans doute tout autant à l’originalité et la cohérence de sa marque qu’à son dynamisme commercial, à son « envie d’aller chercher le client », précise Isabelle Gleize. Des opérations pour fidéliser la clientèle lyonnaise – comme des dimanches relooking pour toutou et maîtresse -, ou un défilé de mode canine prévu à Paris ce printemps 2011. Une politique qui porte ses fruits puisque la marque est présente dans une quarantaine de points de vente dont deux au Danemark et en Suisse.
En face, l’atelier-boutique de Coupé Couzu, marque de patrons pour la couture, co-lauréate des Talents de Mode 2010. Anne-Hélène, la créatrice de la marque se définit comme « pas vraiment couturière, pas vraiment styliste, pas vraiment modéliste, mais un peu tout à la fois » ! Ce qui caractérise les patrons Coupé Couzu, c’est la simplicité des modèles et leurs possibles combinaisons, la clarté des explications, mais aussi la préoccupation écologique comme valeur ajoutée. Les pochettes-patrons et les cahiers d’explications sont en papier recyclé, les planches de patrons imprimées sur du papier provenant de forêts éco-gérées (label Imprim’vert). Quant au tissu, si Anne-Hélène travaille encore sur du traditionnel pour des raisons de coûts, elle est en quête de solutions pour des matières bio à des prix moins élevés.
Là aussi, des opérations sont mises sur pied en direction de la clientèle, comme des « Apéros Couture » : le premier aura lieu le 3 février 2011 de 19h à 22h…
Côté design, Rémi Bouhaniche et Amaury Poudray, créateurs de la marque USIN-e offrent dans leur atelier-boutique du passage Thiaffait la démonstration à la fois de leur éclectisme dans les matériaux et de leur recherche formelle et fonctionnelle. Bois, métal, verre, rotin, textile, crins de cheval, « sans a priori sur les matières » le duo se dit aussi soucieux de « créer des échanges ». Tous les objets représentent « un an de recherche avec les artisans ». A l’arrivée : des objets épurés dont l’apparente simplicité dissimule la technicité, comme cette lampe qui s’allume en étirant sa base. La marque USIN-e est présente à l’édition 2011 de Maison&Objet à Paris, du 21 au 25 janvier 2011.
Après une petite pause au bien nommé « Café Cousu », lui aussi résident du Passage, une visite s’impose dans quelques-unes des boutiques qui se sont installées dans le quartier, à l’initiative souvent d’anciens résidents.
Comme la marque Laspid, qui propose des créations graphiques originales éditées en séries limitées – de 10 à 100 exemplaires – sur des t-shirts et vêtements pour adultes et enfants, sacs et accessoires, le tout issu du commerce équitable et en coton bio. Résidents au Village jusqu’en octobre 2010, Baj et Seb viennent d’ouvrir leur vaste atelier-boutique Place du Griffon, à proximité du Passage Thiaffait. Avec une production d’ « une série par semaine en édition limitée », ils se définissent « plus comme un structure d’édition que comme une marque ». Expliquer la production sérigraphique, travailler sur l’histoire du T-shirt sont donc autant de préoccupations qui animent le duo de créateurs. Côté graphisme, ils aimeraient bien « créer des visuels locaux » avec notamment « une série sur la Croix-Rousse »…
Tout à côté, la boutique la boutique epOx, où Sarah Diallo (une ancienne elle aussi du Village) propose sa collection de prêt-à-porter féminin et d’accessoires sous sa marque Tramwear, qu’elle a lancée au milieu des années 2000, ainsi que des produits d’autres créateurs, comme les chapeaux de La Tribu des Oiseaux. Il n’est pas rare en effet que les espaces soient ainsi mutualisés, comme on pourra aussi le constater dans la boutique ouverte dans la rue René Leynaud, au pied du Village, où la très originale marque de gants FST Handswear accueillait quand on y est passé deux créateurs de prêt-à-porter féminin. Comme le fait remarquer Isabelle Gleize, « le parrainage, la transmission, la mise en réseau » des « anciens » avec les plus jeunes artistes, vient s’ajouter aux services que le Village offre à ses résidents et adhérents pour accroître leur visibilité, notamment en matière de communication.
Un domaine qu’Isabelle Gleize s’est tout particulièrement attaché à faire évoluer, au cours des dernières années, pour mieux mettre en valeur et faire connaître l’activité et les créateurs du Village, au-delà de l’échelon régional. Outre un accompagnement aux relations presse proposée aux adhérents, la participation à des événements comme la Biennale du Design de Saint-Etienne, un concours, Talents de Mode, a été créé en 2007. Il est présidé chaque année par une personnalité de la mode (successivement Max Chaoul, Agatha Ruiz de la Prada, Chantal Thomass et Jérôme L’Huillier) et la Fédération du Prêt-à-porter a offert un espace sur son Salon parisien aux lauréats 2010.
Dix ans, c’est le moment de faire le point. Avec « 78% des créateurs accompagnés qui ont poursuivi leur activité au sein de leur entreprise, un taux largement supérieur à la moyenne nationale », 700 points de vente en France et à l’étranger pour l’ensemble des entreprises et 3 600 000 de chiffre d’affaire cumulé en 2009, le bilan du Village des Créateurs est loin d’être négligeable . D’autant qu’avec un budget de 400 000 euros par an, financé essentiellement par les collectivités locales (la communauté urbaine du Grand Lyon, la région Rhône-Alpes et la ville de Lyon) et, pour une moindre part (environ 10%), par des partenaires privés, le Village serait selon une étude « une des structures les moins coûteuses », souligne Isabelle Gleize.
Dix ans, c’est aussi des pistes pour faire évoluer les choses. Pour Isabelle Gleize, un « recalibrage des services » s’impose. L’aide au démarrage des entreprises devrait intervenir « en amont des projets » et en « fédérant les structures d’accompagnement », tandis que des services restent à définir pour les entreprises « matures », appelées à se regrouper en 2011. Par ailleurs, l’équipe du Village s’est étoffée d’une personne supplémentaire pour s’occuper de l’accompagnement commercial des entreprises.
Entre autres manifestations prévues, ce dixième anniversaire sera peut-être aussi l’occasion d’une exposition à Paris. En 2008, la « montée » dans la capitale d’une quinzaine de créateurs, exposés dans les locaux de la délégation du Grand Lyon, dans le 7ème arrondissement, avait permis à nombre de Parisiens, dont l’auteure de ces lignes, de découvrir le Village des Créateurs et la diversité des talents qu’il accompagne.(1)
(1) Pour en savoir plus sur cette exposition de 2008, cliquer ici
DERNIERE MINUTE !
Village des Créateurs invité du Salon 080 Barcelona Fashion
Cinq marques soutenues par le VDC, réseau des jeunes entreprises mode, déco et design en Rhône-Alpes, seront exposées.
Le Gouvernement Catalan présente la 7e édition du salon 080 Barcelona Fashion du 31 janvier au 2 février 2011 à Barcelone.
Depuis 2007, une sélection pointue de jeunes marques émergentes en mode et design est présentée à la presse et aux acheteurs nationaux et internationaux.
Pour faire connaître la création française en Espagne, le Gouvernement Catalan et le Village des Créateurs s’associent. Une opportunité de développement européen pour ces jeunes entrepreneurs soutenus par le Village des Créateurs. De plus, ils bénéficient d’un accompagnement commercial terrain : nouveau service du VDC* créé depuis septembre 2010.
Les créateurs :
Rose Carbone, ligne de vêtements féminins à l’esprit girly tendance retro-rock.
Sa ligne se décline principalement autour de l’intemporelle robe à laquelle s’ajoutent des paletots, tops et manteaux.
Tramwear, Le caractère affirmé de cette créatrice donne corps à la matière en jouant sur des volumes architecturaux pondérés, une logique stylisée et une gamme chromatique méditée. Des collections aux lignes nouvelles, simples et pragmatiques qui se définissent par l’élégance des coupes épurées, à la fois discrètes et un brin espiègles.
FST Handwear, gants sérigraphiés
Originaires de Grenoble, capitale historique de la ganterie de luxe, les 3 créateurs donnent un grand coup de poing dans l’univers traditionnel de la ganterie et imaginent le gant comme un nouveau support artistique. A l’image du Tee-Shirt et des sneakers, devenus en quelques décennies des vecteurs d’expression incontournables, le gant est désormais un réel moyen de distinction.
Si tussor, maroquinerie et bagagerie
Elégance, féminité et sobriété, définissent l’esprit de la marque. Tous les modèles sont entièrement fabriqués dans un atelier de la région lyonnaise soucieux de préserver un savoir-faire transmis d’une génération à l’autre et où le maître mot est qualité.
Terre Vagabonde, bijoux en céramique.
Une force d’évocation graphique, des effets de matière, d’écriture, un travail photographique en noir et blanc… Au delà du bijou, Terre Vagabonde est une recherche artistique qui donne naissance à des objets aux formes épurées : de vrais tableaux en miniature.
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