Pour sa troisième édition, du 22 février au 31 mars 2013, le festival Circulation(s), réinvestit le parc de Bagatelle à Paris. Organisée à l’initiative de l’association Fetart, cette manifestation a pour vocation de favoriser l’émergence des talents de la jeune photographie européenne et de les faire connaître au public. Lequel est invité cette année à découvrir le travail d’une quarantaine de photographes exposés dans la galerie Côté Seine et le Trianon. Un parcours passionnant dans un lieu plein de charme …
… Et finalement pas si loin, ni si difficile d’accès (voir ci-dessous).
Forte des quelque 25 000 visiteurs pour la seconde édition en 2012 de son Festival Circulation(s), l’association Fetart récidive, avec une nouvelle programmation d’oeuvres photographiques, riche et diversifiée. À la trentaine d’artistes sélectionnés, suite à un appel international, par le jury 2013, s’ajoutent ceux invités par le parrain du Festival – cette année François Cheval, directeur du musée Nicéphore Niepce -, par l’Ecole supérieure des arts Saint-Luc à Liège (Belgique) et la galerie Anzenberger (Autriche), sans oublier les projets spéciaux accueillis sous forme d’exposition, de projection et d’installation. Au total 43 artistes d’une quinzaine de pays offrent un panorama de la jeune création photographique européenne, avec une grande diversité de talents, de propos et de techniques.

En haut, « Simplet » – en bas, « Blanche-Neige » / « Les sept mercenaires », Philippe Pétremant / © db
Une diversité au sein de laquelle on s’est permis de faire sa propre moisson, partielle et forcément partiale. En commençant par la carte blanche donnée à François Cheval qui a lui même donné carte blanche à quatre photographes. Une sélection bien à l’image du parrain iconoclaste de cette édition 2013 (1), avec notamment la série Les sept mercenaires, de Philippe Pétremant. Ces sept là, déclinés en fragments de vrais/faux billets de banque attachés par un trombone et dont les effigies sont rebaptisées Simplet, Timide, Grincheux… en un humoristique et politiquement incorrect détournement de la nature morte et de l’histoire mondiale.
C’est à une autre sorte de détournement que se livre Thomas Herbrich (Galerie Anzenberger) en tournant en dérision la théorie du complot avec sa série The truth about the moon landing. Pour l’artiste, oui, les Américains ont bien mis le pied sur la lune, en ce mois de juillet 1969. Mais comme on avait oublié le câble de la caméra, il a fallu tout reconstituer en studio !… C’est un certain Stanley Herbrich qui s’ est chargé de ce bricolage burlesque dont la série de 17 photos retrace toutes les étapes. On aura encore l’occasion de goûter à l’humour du photographe et à son talent, puisqu’il y aura une suite : « qu’est-il arrivé à mon héros Stanley après son atterrissage sur la lune ? Il est devenu le directeur de la station spatiale ukrainienne “Potemkine” et cette histoire est encore plus drôle« , promet Thomas Herbrich.

Thomas Herbrich, « The Moon Landing © montage db
On reste dans le domaine spatial, entre fiction et réalité, avec The Afronauts, de Cristina de Middel. Invitée dans le cadre des projets spéciaux, l’artiste espagnole recrée le projet zambien de conquête spatiale lancé en 1964 par un chercheur, Edward Makuka Nkoloso. Le projet sera vite abandonné faute de financement et surtout d’être pris au sérieux. Entre temps, une douzaine de de jeunes Zambiens se seront entraînés à l’apesanteur dans un camp près de Lusaka…Dans la mise en scène photographique orchestrée par la photographe, le rêve devient réalité… mais les images suscitent au final l’ambiguité, entre hommage à une ambition spatiale somme toute légitime – comme semble l’avoir voulu l’artiste – et dérision.
Ambiguité également devant la série Sur la route de Bikoko à Bokonda réalisée par Patrick Willocq (sélection du jury/lauréat SFR Jeunes Talents) en République Démocratique du Congo. L’artiste a voulu, dit-il, témoigner d’un quotidien paisible dans des villages de l’ouest du pays, à l’opposé de la réalité de l’est, « réalité sur laquelle les médias occidentaux se focalisent et qui bien que dramatique, stigmatise l’ensemble du pays« . Si la beauté formelle des photos est indéniable, la mise en scène théâtrale et figée de ce quotidien, y compris dans l’expression des personnages, crée la vision d’une paix artificielle. De là à imaginer une tout autre réalité…

« Sur la route de Bikoro à Bokonda », Patrick Willocq © montage db
Mais, finalement, n’est-ce pas là l’essence même de d’une « bonne » photo que de susciter une émotion, un sentiment, et une histoire que chacun narrera à sa façon ? …

« Bokassa, la chute d’un tyran », Dominique Secher © db
Sic transit gloria mundi, tel pourrait être le sous titre de la série « Bokassa, la chute d’un tyran », des photographies prises par Dominique Secher (sélection du jury) dans le château de Hardricourt, et exposées en plein air, dans la rotonde verdure ceinte de statues qui mène au Trianon. Dans les salles dévastées de ce qui fut la dernière résidence en France de Bokassa, le portrait de l’ex-empereur auto proclamé puis déchu git à terre au milieu de papiers épars. On croit volontiers le photographe lorsqu’il dit avoir craint les fantômes dans ce lieu ouvert aux quatre vents où un épisode de la Françafrique s’est figé.

« Mirror Badger », « Skeletons in the closets », Klaus Pichler © db
Figés, le sont aussi les animaux en plâtre ou taxidermisés que Klaus Pichler (galerie Anzenberger) a mis en scène dans les sous-sol du Musée d’Histoire naturelle de Vienne, dans sa série Skeletons in the closets. Surgissent des images et tableaux insolites, tour à tour inquiétants ou drôles, laissant le champ libre à l’imagination de celui qui les regarde…
Pour conclure : Circulez, tout est à voir, au Festival Circulation(s) ….
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(1) Il n’est qu’à lire « Le mot du parrain » publié dans le catalogue de l’exposition, dont le titre donne le ton : Instructions aux jeunes photographes avides de succès….
Deux options pour se rendre de Paris à Circulation(s) par les transports en commun :
1 – Accès à la galerie via l’allée de Longchamp, Paris16 (itinéraire conseillé, attention, cet accès est fermé le week‐end à partir de 18h15) :
• Métro Ligne1, Station « PorteMaillot »:Sortie n°6- Av.Charles de Gaulle-côté impair- bd André Maurois
• puisBus 244 (5minutes de trajet en bus)
• Arrêt de bus « Bagatelle/PréCatalan » (4ème arrêt)
A l’arrêt de bus, revenir sur ses pas quelques mètres sur le même trottoir et tourner à gauche dans l’allée du Point du Jour (2’ à pied).
• Entrée par la grille du « Point du jour » du parc.
2 – Accès à la galerie via la route de Sèvres à Neuilly, Paris 16ème
• Métro Ligne1, Station « Pont de Neuilly »
• puis Bus 43, Arrêt « Place de Bagatelle »
• Longer la route de Sèvres à Neuilly jusqu’à l’entrée du parc sur la gauche (10’ à pied).

Parc de Bagatelle, vue sur les tours de la Défense des marches du Trianon © db
A noter que le parc de Bagatelle accueille à partir du 19 mars au 2 juin 2013 les sculptures de Robert Arnoux.