« La Magie lente » opère à nouveau au Théâtre Paris Villette

 » La Magie lente », Benoit Giros © DR

Cette « Magie lente », présentée cette fois sur la scène du Théâtre Paris-Villette , est celle de la psychanalyse. Si l’expression est empruntée à Freud, il ne s’agit pas ici de théorie, mais d’un récit fictif, la narration d’un cas, celui de M. Louvier. Ce dernier, diagnostiqué schizophrène pendant dix ans, a décidé de consulter un nouveau psychiatre. Lequel, persuadé d’emblée que ce diagnostic est erroné, va user de la magie lente du processus psychanalytique pour que son patient se réapproprie peu à peu avec ses propres mots son histoire familiale et son terrible secret. Grâce au texte sans concession et remarquablement construit de Denis Lachaud et l’interprétation à la fois sobre, intense et juste  de Benoit Giros, seul en scène, le spectateur est embarqué lui aussi progressivement dans ce difficile parcours à la découverte de soi.
À voir jusqu’au 7 décembre 2019

« La Magie lente », Benoit Giros © DR

Ce spectacle, on l’avait découvert en 2017 au théâtre de La Reine Blanche. C’est maintenant la scène de la salle blanche du Théâtre Paris-Villette, fraîchement rénové, qui l’accueille. Le comédien, pantalon gris et chemise blanche, accueille les spectateurs qui prennent place dans la salle, à l’instar des participants au colloque devant lesquels un praticien s’apprête à faire une communication sur une erreur de diagnostic. Sur la scène une table avec une chaise et un ordinateur portable, d’autres chaises sont alignées au fond, il y a des verres, de l’eau, comme il convient à un conférencier.

L’exposé liminaire résume de manière claire et concise le cas de M. Louvier tel que le nouveau psychiatre le perçoit.

« Dans le métro, des hommes me disent qu’ils veulent ou vont m’enculer » : au terme d’ « hallucinations », utilisé pendant dix ans pour qualifier ce que dit Louvier, le psy substitue celui de « pensées ». Ce qui modifie considérablement la donne. Bref, ce « schizophrène hétérosexuel » s’avérerait être plutôt un « bipolaire homosexuel ». Ces mots du conférencier suscitent un léger rire dans la salle; mais on ressent une vague inquiétude pour la suite : cela ne serait-il pas un peu schématique? On va très vite être rassuré : l’option est celle de la « magie lente »  et ce qui va se jouer sur la scène, c’est le déroulement de la cure psychanalytique de Louvier tel qu’imaginé et écrit par Denis Lachaud. Non sans s’entourer de toutes les précautions :« J’ai pris le chemin de l’hôpital pendant plusieurs mois. A Versailles, Aulnay-sous-Bois et Avignon, raconte-t-il. J’ai observé, écouté. J’ai commencé à écrire. Le professeur Yves Sarfati, alors chef de service à l’hôpital Mignot de Versailles et passionné par le théâtre, acteur lui-même, a accepté avec enthousiasme de superviser l’écriture de cette pièce… »

« La Magie lente « , Benoit Giros

Il en résulte un texte passionnant (1) qui restitue les différents stades de la cure psychanalytique, ses découvertes, ses surprises, la puissance des mots – sans en édulcorer la violence ou la grossièreté – leur surgissement inattendu et leurs effets imprévisibles.

Ce parcours, ces mots et les émotions qu’ils suscitent, Benoit Giros les a fait siens. Seul sur scène, le comédien incarne Louvier ainsi que tous les personnages – le psychiatre conférencier, l’ancien et le nouveau psychiatre, son oncle, les voix qu’il entend  – qui font partie de son histoire, passée et présente. Sa présence aussi intense que sobre, son jeu subtil où alternent l’angoisse, la colère, le désespoir, la folie, l’hésitation, l’ironie emportent l’adhésion du spectateur à ce cheminement douloureux pour que « la vérité arrive à la surface ».

Ce serait dommage de rater cette belle alchimie à l’oeuvre sur la scène, entre la puissance d’un texte, le jeu captivant d’un acteur et la magie lente de la psychanalyse…Sans oublier la sobre efficacité de la mise en scène signée Pierre Notte.

À noter le mercredi  27 novembre 2019, la rencontre avec Benoit Giros, Denis Lachaud et Yves Sarfati (Psychiatre – Psychanalyste)

Capture d’écran 2019-11-22 à 13.21.40

Théâtre Paris-Villette, la salle blanche /DR

(1) Le texte est édité chez Actes Sud

THÉÂTRE PARIS-VILLETTE
211 avenue Jean Jaurès
75019 Paris
01 40 03 72 23

M°5 Porte de Pantin
Tramway 3B : Porte de Pantin – Parc de la Villette
Station Vélib à proximité avenue Jean Jaurès

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