Galerie des Gobelins : Rencontre entre « Le siècle des Lumières » et le kitsch de Pierre et Gilles

"Tenture des Nouvelles Indes", détail ©db

« Tenture des Nouvelles Indes », détail ©db

Prolongée jusqu’au 18 janvier 2015, l’exposition Les Gobelins au siècle des Lumières – Un âge d’or de la Manufacture royale présente une trentaine de tapisseries, autant de cartons peints ou d’esquisses, ainsi que des pièces de mobilier et des documents d’époque, pour illustrer la production de la manufacture des Gobelins à son apogée en ce XVIIIe siècle.
Tandis que la Carte blanche donnée à Pierre et Gilles fait dialoguer jusqu’au 5 octobre 2014 l’univers kitsch du couple d’artistes avec les meubles et oeuvres décoratives du Mobilier national. 

 

Âge d’or de la manufacture des Gobelins, le XVIIIe siècle a vu la création de quelques 1700 tapisseries réparties en une quarantaine de suites ou séries. Des artistes talentueux, avec notamment Charles Coypel, des progrès mécaniques auxquels sont associés les noms de Vaucanson et Soufflot, et des commandes officielles ou de grands amateurs d’art, comme Madame de Pompadour, contribuent à cette profusion créative.

Une profusion dont l’exposition propose un florilège avec des tapisseries sélectionnées pour « leur état de fraicheur exceptionnel« . Fraîcheur de l’état de conservation (qui ne laisse pas d’émerveiller) mais aussi des sujets évoqués. Car aux côtés des traditionnels sujets religieux, d’histoire épique ou du passé national, figurent  des thèmes novateurs, au premier rang desquels la fameuse tenture de « L’Histoire de Don Quichotte ».

L'Histoire de Don Quichotte de Coypel ©Mobilier national/Isabelle Bideau

L’Histoire de Don Quichotte de Coypel ©Mobilier national/Isabelle Bideau

 

Commandée en 1714 par le fastueux duc d’Antan, directeur des bâtiments du roi depuis 1708, cette suite restitue le pittoresque des personnages et le rocambolesque des situations issus de l’imagination de Cervantes. Charles Coypel est chargé de la composition des scènes historiées – au nombre de sept – et l’ornemaniste Audran des bordures décoratives. (1) La rénovation régulière de ces bordures au fil des décennies fit de L’Histoire de Don Quichotte de Coypel une sorte de best-seller de la tapisserie tout au long du XVIIIe siècle, avec  quelque deux cents tapisseries tissées à partir des cartons de l’artiste…

Marie-Antoinette revue par Pierre et Gilles ©db

Galerie des Gobelins, Marie-Antoinette revue par Pierre et Gilles ©db

Si on ajoute – de manière un peu iconoclaste –  le côté BD de l’ensemble, les scènes historiques apparaissant comme autant de « vignettes » enchâssées dans leur cadre, nous voilà tout préparés à aller à la rencontre  de l’installation de Pierre et Gilles dans la pénombre du Salon Carré… Une pénombre qu’éclaire la mise en lumière d’un remake du portrait de Marie-Antoinette par Madame Vigée-Lebrun, avec la bimbo iconique Zahia Dehar dans le rôle de la reine (2)…

À cette figure centrale de la Carte blanche donnée au couple d’artistes, l »auteure de ces lignes – qui en matière de duos artistiques penche plutôt pour les très politiquement incorrects Gilbert & George (3) – avoue avoir préféré la mise en scène de son « écrin », un décor entre boite de nuit avec éclairs de lumières bleues et vertes, et  grenier avec rongeurs en peluche autour d’une chaise renversée sur le parquet… Un dialogue qui n’est pas sans charme entre l’univers kitsch des artistes et la somptuosité des objets ornementaux (cheminée, chenêts, miroirs…) et des canapés et fauteuils extraits des collections du Mobilier national.

Galerie des Gobelins, Carte blanche à Pierre et Gilles ©db

 

Des collections dont on peut avoir aussi un aperçu  jusqu’au 17 novembre 2014 dans le nouvel espace d’exposition aménagé à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle, (Hall M du terminal 2E).

Galerie des Gobelins, carte blanche à Pierre et Gilles © db

Galerie des Gobelins, carte blanche à Pierre et Gilles © db

 

(1) La place donnée au caractère à la fois décoratif et fonctionnel de ces « alentours », ces encadrements ornementés qui sont souvent l’oeuvre d’artistes spécialisés est un des aspects intéressants mis en évidence dans l’exposition.
(2) Karl Lagerfeld s’est également emparé de l’ancienne escort-girl reconvertie dans la création de lingerie…
(3) Signalons la rétrospective consacrée aux artistes britanniques au Nouveau Musée national de Monaco (jusqu’au 2 novembre 2014) avec près de cinquante œuvres.
À cette occasion, on ne peut que regretter, avec Philippe Dagen que la France fasse si peu de cas des deux artistes : « Depuis quand n’y a-t-il pas eu une exposition de Gilbert & George dans un musée français ? Presque dix ans, la dernière ayant eu lieu en 2005 à Saint-Etienne. Depuis combien de temps n’y a-t-il pas de rétrospective consacrée en France au couple le plus célèbre de l’art actuel ? Depuis 1997, au Musée d’art moderne de la Ville de Paris. Et au Centre Pompidou ? Ils y ont été invités, mais c’était en 1981 » … (In Le Monde, 12/08/2014)

"Les Gobelins au siècle des Lumières" 2014 © db

« Les Gobelins au siècle des Lumières » 2014 © db

 

 

Galerie des Gobelins
42 Avenue des Gobelins
75013 Paris, France
tél : +33 1 44 08 53 49

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