Le Musée d’art et d’histoire de Saint-Cloud accueille dans ses murs et son jardin des oeuvres de Coskun. Le peintre et sculpteur d’origine turque est invité dans le cadre de la manifestation « un artiste – un univers », une carte blanche donnée chaque année à un artiste vivant. Avec « il était une fois« , Coskun nous invite à partager sa vision du monde au travers de sculptures souvent monumentales taillées dans le bois et de tableaux récents. À voir jusqu’au 13 juillet 2013.
Il faut souhaiter que pour ces dernières semaines de l’exposition, la pluie cesse de s’inviter. Car le contact avec l’oeuvre sculptée de Coskun se noue d’abord à l’air libre dans le jardin. Massives ou élancées, des silhouettes humaines se détachent dans la verdure, imposant leur présence spectaculaire entre les arbres. La tronçonneuse les a taillées dans la masse du bois, et les angles vifs l’emportent largement sur le modelé. N’était-ce la polychromie, on pourrait les croire inachevées. Elles n’en sont que plus puissantes et mystérieuses.

Coskun, « Torse », 2002 / « L’homme de théâtre », 2000 © db
« Il était une fois« … Ce sont pourtant des histoires sans mystère que nous conte Coskun dans sa revisitation des contes. À moins de considérer que la cruauté et la violence de la société des hommes relèvent encore de l’ordre de l’inexpicable. Une violence et une cruauté dont les contes issus du folklore populaire se nourrissent. À commencer par un des plus connus, Le Petit Chaperon rouge. Le tableau éponyme de Coskun est une véritable scène de carnage, à la limite du supportable. Supporterait-on mieux les images sanglantes offertes quotidiennement par la télévision que les formes et couleurs de la toile? Oui, bien sûr. L’art – et au premier chef la peinture – est là pour réveiller l’inquiétude, déranger, bouleverser, questionner.

Coskun, « Le Petit chaperon rouge final », détail, technique mixte sur contreplaqué métallique, 2012 © db
Reconnu surtout pour sa sculpture, Coskun « a toujours été peintre dans l’âme« , souligne Emmanuelle Le Bail, directrice du musée et commissaire de l’exposition. Artiste autodidacte, il a quitté sa Turquie natale pour Paris en 1980. À partir des années 1990 et pendant une vingtaine d’années il privilégie pourtant la sculpture, sans cesser réellement de peindre. « Coskun est actuellement à à un tournant décisif de sa carrière, explique Emmanuelle Le Bail. Il prend nettement le virage de la peinture« . L’exposition au Musée des Avelines, qui rassemble à parts égales peintures et sculptures témoigne de cette évolution.

Coskun, « Le guetteur », acrylique sur toile, 2012 ©db

Coskun dans son atelier © Fabrice Robin
Expressive et narrative, la peinture de Coskun lui permet sans doute « d’en dire plus », comme dans la toile intitulée Le Guetteur. Un homme de face à la silhouette massive et inquiétante se détache sur un fond où l’on distingue les lettres, à l’envers, de ce qui semble être une affiche de cinéma et où le seul mot lisible est « Loup »… Le guetteur s’apparente plutôt à un prédateur, on pense à M Le Maudit… On le voit, Coskun nous renvoie davantage à Hobbes (Homo homini lupus) qu’à Rousseau…
Une autre toile intitulée Je me fais du cinéma « est une référence explicite de la passion de Coskun pour le 7ème art mais aussi un clin d’oeil à Claude Nougaro « Sur l’écran noir de mes nuits blanches, moi je me fais du cinéma« , souligne Emmanuelle Le Bail. (1) Si les peintures exposées témoignent d’une grande force, on avouera néanmoins notre préférence pour les sculptures et leur saisissante étrangeté, et aussi une certaine tendresse, plus perceptible que dans ce que nous avons pu voir dans l’oeuvre peint.
Et puisque nous sommes au Musée des Avelines, on n’oubliera pas de profiter de la partie « gourmande » du lieu, en dégustant un thé raffiné et une pâtisserie qui ne l’est pas moins dans le bel espace de la rotonde, au voisinage d’une ronde de statues de Coskun, ou sur la terrasse, si le temps le permet…

Coskun, sculptures dans la rotonde © db
(1) Saluons, une fois de plus l’excellente programmation du musée d’art et d’histoire de Saint-Cloud, où alternent expositions thématiques en lien avec le patrimoine local et expositions d’art contemporain. La prochaine exposition sera consacrée au peintre clodoaldien Edouard Dantan ((1848-1897). Quelques expositions précédentes : Jef Aérosol cartonne à Saint-Cloud/ Saint-Cloud fait son cinéma /1870/1871 Saint-Cloud, l’année terrible Musée des Avelines 60 rue Gounod – 92210 Saint-Cloud Tél. : 01 46 02 67 18