« Avec l’Espace » : une exposition d’art contemporain au CNES

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Stefan Eichhorn, Salvage#1 © S.E.

C’est une exposition singulière que celle organisée par l’Observatoire de l’Espace, le laboratoire culturel du Centre national d’Études spatiales, et qui se tient du 18 au 20 mars au siège du CNES à Paris.
Singulière,  à l’image de toutes les actions entreprises depuis plus de vingt ans par l’Observatoire de l’Espace dans le but de susciter des rapports nouveaux entre la culture, l’art et l’Espace. Comme cette nouvelle exposition « Avec l’Espace »   où les réalisations de vingt artistes contemporains – quel que soit le médium utilisé – nous invitent à repenser et questionner notre rapport à l’espace.

Depuis son lancement en 2000, et toujours animé par celui qui en a été l’instigateur, l’astrophysicien Gérard Azoulay (1), l’Observatoire de l’Espace multiplie les initiatives pour faire de l’exploration de l’espace une aventure qui ne soit pas seulement scientifique et technique mais aussi artistique et culturelle et ce dans un perpétuel renouvellement. Artistes et écrivains sont invités en permanence à créer leur vision de l’aventure spatiale au travers de résidences, réalisations dans l’espace, expositions, festivals, livres, revues… (2)

AZOULAY Perrine Gamot

Gérard Azoulay © Perrine Gamot

Qu’on ne se méprenne pas : il ne s’agit pas de relayer « une vision triomphante et héroïque » de l’exploration de l’espace, telle qu’elle a pu être véhiculée au XXe siècle, mais, en questionnant le rapport de l’homme à l’espace, d’« interroger l’homme sur sa condition sur terre », et les artistes « ont une place privilégiée pour ausculter notre monde et proposer une parole forte pour repenser notre culture », souligne Gérard Azoulay.

L’objectif est aussi de faire vivre et partager avec le public le patrimoine – matériel et documentaire – engendré par l’Espace et dont le CNES est détenteur.

C’est ainsi qu’ on pourra voir dans l’exposition Avec l’Espace une sélection des aquarelles réalisées par Erwan Venn dans le cadre d’un projet consacré à à la construction d’une base spatiale à Kourou en Guyane dans les années 1960. Kouroupolis est le fruit d’un travail de recherche d’un an effectué à partir d’un corpus d’archives mis à la disposition de l’artiste : rapports techniques, plans, photographies, témoignages oraux et films institutionnels ou amateurs. (3)

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Erwan Venn, Kouroupolis 2021 © E.Venn

Sylvie Bonnot s’est elle aussi intéressée à Kourou, mais plus précisément au site de lancement Soyouz situé dans le centre spatial guyanais, second volet de son projet Géographies spatiales de Soyouz. C’est par la photographie qu’elle a observé « la chorégraphie des gestes et formes nécessaires au lancement de la fusée ».

Dans le même ordre d’idée – l’impact  de l’exploration spatiale sur Terre – l’Observatoire de l’Espace, à l’occasion des Journées européennes du Patrimoine les 17 et 18 septembre 2022, présentera au siège du CNES une exposition dédiée à la création du Centre spatial de Toulouse (CST) de 1965 à 1973. À cette occasion, le public pourra découvrir le résultat des recherches effectuées par le plasticien Benoît Géhanne, l’auteur Éric Pessan, et la géographe Isabelle Sourbès-Verger, tous trois membres du Groupe de recherches artistiques et culturelles sur l’Espace (GRACE) sur l’implantation de ces infrastructures spatiales en région toulousaine.

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Sylvie Bonnot, Ergoliers 2 /

Dans un autre registre, toujours dans le cadre de l’exposition Avec l’Espace, Stefan Eichhorn  s’est penché sur le sort des satellites et autres débris évoluant sur une orbite géostationnaire destinée à recevoir les engins hors de fonctionnement. À partir d’une collecte documentaire, il procède à un recyclage fictif de ces éléments pour créer des sculptures, sortes de « chimères satellitaires ».  Photographiées dans un espace indéfinissable et tirées en grand format, elles sèment le trouble sur la véracité de leur existence…(voir photo plus haut)

Bien réel, par contre, le Télescope intérieur, conçu par l’artiste américano-brésilien Eduardo Kac et réalisé par l’astronaute français Thomas Pesquet à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS) en 2017. Une première « performance artistique et poétique », dans l’Espace à laquelle a contribué l’Observatoire de l’Espace et qui a toute sa place dans cette nouvelle exposition. (4)

« Télescope Intérieur » dans l’ISS

« Télescope Intérieur » dans l’ISS

Laquelle se fera aussi l’écho d’une autre initiative de création dans l’espace à l’horizon 2023;  il s’agit cette fois d’une expérience musicale.  Baptisée « Oscar »,  elle a été imaginée par l’artiste Stéphane Thidet. Une création au long cours,  puisqu’il s’agit d’aller au-delà de « la simple traduction sonore des ondes électromagnétiques enregistrées sur Terre » , et « d’éprouver musicalement et in situ l’intégralité d’un voyage dans l’Espace ».

Entretemps, l’Observatoire de l’Espace a lancé en février 2022 un nouvel appel aux artistes pour concevoir et créer une œuvre d’art visuel en impesanteur qui sera élaborée lors d’un vol parabolique en Airbus Zero-g  (5).

Ce n’est là qu’un aperçu des artistes présentés dans l’exposition Avec l’Espace, tous soutenus par l’Observatoire de l’Espace du CNES qu’ils soient en résidence hors les murs, lauréats d’un des appels à projets, ou invités au sein d’un des programmes de création.

Un dernier mot au sujet du titre de l’exposition « Avec l’Espace ». Pour Gérard Azoulay, qui en assure le commissariat, les artistes dont les oeuvres sont présentées «  ne se réclament d’aucun mouvement artistique commun. Ils ne sont pas « face à », ni « contre », ni « pour », ils agissent juste…« avec l’Espace ». La question de l’« avec » souligne l’engagement particulier de ces artistes au regard de l’urgence à reconsidérer le rapport de l’art actuel et de l’Espace, afin qu’il ne se situe plus du côté de la conquête et la domination mais de l’attention à l’autre. »

cnes-siege-web

Siège du CNES à Paris/DR

(1) Pour en savoir plus sur Gérard Azoulay et la création de  l’Observatoire de l’Espace, cliquer ici
(2) En ce qui concerne les publications, à la revue Espace(s), lancée en 2005 et rassemblant les contributions d’écrivains et artistes contemporains autour un thème lié à l’aventure spatiale, est venu s’ajouter fin 2021 Strate(s), plus spécifiquement dédiée à une approche visuelle de l’Espace, par la publication d’archives graphiques et photographiques.
(3) L’ensemble des aquarelles de Kouroupolis rejoindra ensuite le fonds d’art contemporain de l’Observatoire de l’Espace, en dépôt aux Abattoirs, Musée – Frac Occitanie Toulouse.
(4) Télescope intérieur a fait l’objet d’un film réalisé par Virgile Novarina et constitue le premier volume de la collection « Les nouveaux récits de l’Espace », publiés tous deux par les Presses du réel.
(5) L’Airbus A310 ZERO-G (exploité par Novespace, filiale du CNES) est un avion équipé pour le vol parabolique et permet d’expérimenter l’impesanteur par périodes d’une vingtaine de secondes, reproduisant les conditions physiques de la chute libre. Dans le cadre de son programme « Avant-poste », l’Observatoire de l’Espace permet à des chercheurs en sciences humaines de conduire des recherches sur ce phénomène et de contribuer à la production d’une réflexion autour de l’impact de l’Espace sur l’humain et, plus précisément, sur la question gravitaire. C’est dans ce cadre que le philosophe des sciences Étienne Klein a effectué un vol en impesanteur en septembre 2021.

Affiche exposition Avec l_Espace

Exposition Avec l’Espace
Centre National d’Etudes Spatiales

2 place Maurice Quentin
75001 Paris

Entrée libre:
Vendredi 18 mars 2022, de 18 heures à 22 heures
Samedi 19 mars de 14 heures à 20 heures
Dimanche 20 mars de 11 heures à 18 heures

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